Trilogie des besoins dans l’entreprise 2.0

Pour qu’un quelconque projet fonctionne dans une entreprise, on peut basiquement définir certaines conditions de réussite. Elles ne sont peut être toujours pas les seules mais si celles-ci ne sont pas satisfaites on peut, à  coup sur, s’attendre à  ce que le résultat ne soit pas à  la hauteur des attentes. Je vais traiter ici plus spécifiquement des projets visant à  donner aux individus les moyens d’être plus efficaces.

Il faut tout d’abord que le projet découle d’un besoin de l’entreprise. Cette précision peut sembler futile mais l’oublier amène à  certaines déconvenues. Ajoutons qu’il faut également que ce besoin soit identifié comme tel par les collaborateurs. Je m’explique. Le fait qu’il s’agisse d’une nécessité « supérieure » est un des élément qui permet de donner du sens au changement et de porter le message en interne. Je ne dis pas que cela suffit mais il est plus facile de légitimer lorsque le message vient d’en haut que lorsqu’un manager s’efforce de le porter à  son niveau alors que la direction, qui pourtant l’a voulu, semble s’en désintéresser totalement. Cela évite également le syndrome de la « lubie du patron ». C’est un phénomène souvent rencontré dans les organisations où on part souvent dans toutes les directions en raison de la forte réactivité à  la nouveauté d’un ou plusieurs dirigeants mais où on ne mène quasiment rien au bout, un nouveau projet faisant oublier le précédent. A force plus personne ne s’implique car on sait dès le départ que le projet n’ira pas à  son terme. Une preuve également, s’il en est, que l’esprit parfois aventureux de nos digital natives devra également être cadré afin qu’un fort potentiel de flexibilité ne se transforme en chaos absolu.

Il faut ensuite que le projet ait du sens dans le quotidien des collaborateurs, c’est à  dire qu’il leur permette vraiment de faire plus efficacement leur travail quotidien, ce qui concrêtement veut dire qu’il leur simplifie la tche et leur permet d’en faire autant avec moins d’efforts, voire plus à  effort égal. Bien entendu lorsqu’on impose un process il est respecté (en général) et lorsqu’on impose un outil il est utilisé. Reste à  voir avec quelle motivation et quelle conscience.

Reste le « besoin bonus » : celui de l’individu de se réaliser dans son travail. Lorsque ce besoin est également satisfait on obtient souvent des résultats de haute volée dans la mesure où les individus ayant un vrai gain personnel dans le environnement professionnel sont enclins à  donner le meilleur d’eux-même, parfois au delà  même des attentes. Or, force est de constater que l’appellation « bonus » n’est pas usurpée car rare étaient les projets qui impactaient ce besoin. On a rarement vu une personne se réaliser en appliquant une procédure ou utilisant un quelconque outil.

C’est peut être là  une des spécificités des projets « enterprise 2.0 » : ils peuvent utiliser un levier de réussite supplémentaire car impactent cette dimension. Attention : ça ne doit pas être, à  mon sens, leur besoin premier : faute de lien avec le « business » quotidien l’implication ne sera pas au rendez vous. Par contre on peut toucher cette dimension via un projet porté par un besoin business. Je me permet ici de reprendre une slide du diaporama dont je parlais ici et qui fait référence à  la pyramide de Maslow qui, même si on peut la remettre en cause, donne une vision relativement réaliste de l’échelle des besoins.

maslowIci l’auteur de la présentation a positionné le blog comme outil favorisant l’atteinte des derniers paliers. Quitte à  être plus précis j’utiliserai plutôt la notion de social computing, notamment pour la satisfaction du besoin d’appartenance. On peut acquérir l’estime par la publication mais l’appartenance se nourrit de stimuli beaucoup plus diversifiés qui participent d’activités « sociales » (dans le sens anglais du terme) : co-création sur un wiki mais également social tagging, social bookmarking…tout ce qui permet à  un individu d’ajouter sa brique à  celles des autres.

Attention, il ne s’agit pas ici d’une recette magique ni de quoi que ce soit qui relève d’un optimise béat. Il faut bien sur que le besoin d’entreprise existe, ce que je crois être largement le cas. Tirer partie des réseaux informels, des connexions entre individus est clairement un enjeu stratégique pour les années à  venir. L’outil simplifie-t-il la vie des utilisateurs ? Oui, mais soyons réalises, dans une partie seulement de leurs tches. Cela tombe bien, il s’agit là  encore d’une partie sans cesse croissante des besoins des collaborateurs alors que l’économie de l’information prend chaque jour davantage le pouvoir dans nos bureaux et nos tches quotidiennes. Il reste encore cependant une dernière barrière, managériale celle-ci : laisser une place à  ses réseaux, en valoriser les apports (donc que l’entreprise apprenne à  se les approprier), bref que l’entreprise joue également le jeu. Et enfin, reste à  bien doser le démarrage de tout cela : ça n’est pas la perspective de satisfaire ses besoins qui va pousser à  une implication sans faille, ni l’utilisation de ces plateformes qui va permettre aux individus de se réaliser : ce sont deux phénomènes qui s’auto-alimentent donc il faut savoir démarrer « petit », un peu de valorisation pour un peu d’implication qui amènera un peu plus de réalisation qui…

Un cercle vertueux qui ne doit pas faire oublier l’essentiel : l’objectif est bel et bien la performance de l’organisation, et perdre ceci de vue amènera, comme cela a parfois été le cas avec des projets où les collaborateurs devaient légitimement trouver leur compte, à  jeter le bébé avec l’eau du bain.

Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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