Gérer l’information : bientôt une compétence indispensable

Quand on met en évidence la gestion l’importance croissante des flux d’information dans le travail de chacun aujourd’hui, et encore plus demain, on obtient souvent les mêmes réponses : trop d’information, pas le temps, impossible à  gérer… et pourtant…

Et pourtant il va falloir s’y faire comme le souligne une étude récemment publiée par l’UNESCO. Il ne sera bientot plus question d’y voir une contrainte nécessitant un effort mais une compétence élémentaire.

De quoi parle-t-on précisément ?

Les enjeux sont clairs : trouver, extraire, organiser, évaluer et utiliser efficacement l’information.

Il est également intéressant d’observer tout cela en regard des caractéritisques de nos fameux digital natives à  qui l’on prête à  tort ou à  raison toutes les qualités en la matière.

Je ne pense pas qu’ils soient plus aptes que leurs ainés à  gérer de multiples flux d’information en simultané. La seule différence c’est que contrairement à  ceux-ci ils ont pu développer très jeunes cette capacité car ils ont été plongés dans un environnement qui l’a développé. Souvenons nous de toutes les évolutions qui ont marqué le quotidien des salariés, que n’a-t-on entendu. « Savoir utiliser un ordinateur ? Mais vous n’y pensez pas ». « Les cadres vont taper leur courrier eux-mêmes ? Et quoi encore ». Puis… »vous ne pensez pas que les salariés vont apprendre à  se servir d’internet » (quoiqu’en la matière ils s’en servent souvent plus efficacement chez eux qu’au bureau ce qui peut également amener à  se poser d’autres questions). Bref, dans quelques années le simple fait que cette note ait eu une raison d’être fera bien rire dans les chaumières.

Ensuite tout n’est pas acquis : s’ils sont plus à  l’aise pour « encaisser » l’information, les études prouvent qu’ils sont loin d’égaler leurs ainés pour la trouver et en faire une utilisation pertinente. Les « anciens » partent donc avec leurs armes qu’il doivent impérativement transmettre.

En dehors de ces points, je pense que tout est davantage lié à  un changement d’attitude par rapport à  l’information

Trouver : déjà  apprendre à  trouver ensemble et non plus seul. L’entreprise aura également son rôle à  jouer en mettant en rendant ces pratiques d’efficacité collective possibles. Ensuite changer la position de l’individu par rapport à  l’information : aujourd’hui bombardé d’information inutiles il faudra le mettre en capacité de piocher dans ce qui lui est utile pour ne réserver le message « direct » qu’à  des situations précises. Le problème n’est pas tant la masse d’information que nous ayons trop peu d’information utile par rapport à  la masse globale que nous recevons sans pour autant qu’elle soit désirée. Avant de diminuer le volume d’information travaillons d’abord à  en réduire le rapport signal bruit. Ca ne me gène pas de recevoir 100 mails par jour, ce qui me dérange c’est que 5 seulement me font dire « celui-là , si je ne l’avais pas eu, je serais passé à  coté de quelque chose ». Par contre l’information que je reçois via des flux RSS parce que j’ai décidé de la suivre, parce qu’elle provient d’agents de recherche ciblés, parce que parfois elle passe par le filtre de mon réseau (articles bookmarqués par des personnes de confiance, bien « notés » sur une plateforme adéquate…) constitue peut être une masse considérable mais m’apporte un réel bénéfice. Cela prend du temps ? Cela en fait gagner à  des centaines (miliers ?) de personnes qui bénéficient de la publication de mes bookmarks, sur internet comme dans mon travail. Regardez donc le bénéfice global au niveau du temps gagné.

Extraire, évaluer : j’en ai déjà  parlé en partie ci-dessus. Le traitement social de l’information sera essentiel. Le sens critique individuel sera également mis à  contribution : savoir vite faire le tri entre utile et inutile.

Un point me semble essentiel : changer la posture de l’individu victime d’un bombardement informationnel pour en faire un individu qui aménage sa supply chain informationnelle. Savoir ménager des moments où l’on reçoit, où l’on traite et où l’on utilise. Savoir ne pas se jeter sur son outlook au moindre « bip » et attendre d’avoir fini le travail en cours pour ne pas se déconcentrer et devoir se remobiliser. On pense souvent que la multiplication des flux d’information entrants morcelle le travail ce qui nuit à  la productivité : c’est faux. C’est se faire dominer par l’information qui entraine des effets négatifs, l’information est au service du travail de l’individu, il faut savoir prendre le pas sur elle. Et comprendre qu’il y a des infomations à  digestion lente et d’autres a digestion rapide. Que certaines doivent être traitées de suite et d’autres décalées. Bref, avoir des canaux pour chaque type de signal et consulter les bons canaux au bon moment sans courir dans tous les sens. Et savoir ne rien consulter (ou juste le canal « alerte rouge ») lorsqu’on fait quelque chose qui demande une pleine attention.

Si je note une différence générationnelle elle est bien là  : entre ceux qui dominent les flux et ceux que les flux submergent.

Je pense qu’en dehors du fait que nos futurs collègues auront intégré une partie de ce paradigme (il leur faudra apprendre toutefois à  bien l’utiliser), c’est également à  l’école, lors de la formation que les bons réflexes se prendront, s’apprendront. Le système éducatif aura donc également sa responsabilité. Dans combien de « Management School » apprend on à  faire face à  tout cela ?

Demain, savoir construire et gérer sa propre supply chain de l’information sera une qualité aussi évidente et nécessaire que savoir utiliser un traitement de texte aujourd’hui. Qu’on se le dise.

PS : Tiens…cela tombe fort à  propos, mais un colloque sur l’Education à  la culture informationnelle aura lieu en octobre à  Lille. La capitale du nord serait elle à  la pointe sur le changement de paradigme ?

Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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