Que signifie vraiment le digital pour les RH ? (partie #1)

Lorsqu’on parle de RH et de digital je vois deux attitudes chez les observateurs. Pour certains la cause est entendue et les RH ont déjà raté le train voire abdiqué. D’autres comme moi pensent plutôt que la transformation numérique ou digitale des entreprises est une réelle opportunité que, d’ailleurs, certains DRH me semblent prêts à saisir – tout en ayant conscience que cette chance est sans doute la dernière.

Par contre s’il y a un point sur lequel tout le monde s’accorde c’est qu’il s’agit d’un champ qui est pour l’essentiel dans leur territoire et que leur absence est un vrai gâchis. Pas le numérique en tant que tel – et encore – mais le processus de transformation qui amènera une entreprise à vraiment devenir numérique. Si le rôle des RH n’est pas de réinventer les métiers, à part justement le leur, mais de créer les conditions, l’environnement, le socle qui permettra à l’entreprise de se réinventer.

Alors si un département RH a décidé de prendre le leadership sur le sujet ou se rend subitement compte du risque de déclassement auquel il fait face et se demande exactement comment il peut raccrocher les wagons, un petit exercice de clarification s’impose.

Petit tour d’horizon non exhaustif des sujets sur lesquels d’une manière ou d’une autre, les HR peuvent – voire doivent – contribuer à la transformation digitale de leurs organisations. On trouvera principalement trois types de sujets :

1°) Ceux qui sont du ressort des RH et sont impactés par le digital

2°) Ceux qui sont du ressort d’autres mais où les RH peuvent contribuer à créer les conditions du succès

3°) Ceux où les RH ont un rôle « normatif » à jouer pour éviter les dérapages futurs.

Bien sur certains peuvent relever de plusieurs catégories à la fois.

Allons y !

Bien être au travail

Le digital permet une transformation des modes de travail plus souples, flexibles, confortables pour les collaborateurs. L’exemple n’est peut être pas le meilleur ou peut être critiqué pour son manque d’objectivité mais lorsque ATOS évoque sa politique de « Well Being » on voit bien à quel point la technologie y contribue. Idem pour le programme de réduction des emails qui participe également de cette logique.

A l’inverse il faut se garder de tout optimisme béat. Le digital et le mobile qu’on ne peut dissocier de lui rendent le travail ubiquitaire, lui permet de s’affranchir des contraintes de lieu et de temps jusqu’à créer des déséquilibres dangereux. On dit souvent que la frontière entre travail et vie privée tombe, que les deux se mélangent. Ca n’est que partiellement vrai : pour des raisons évidentes le travail s’invitera toujours davantage dans votre vie privée que votre vie privée au bureau. Ce qui était « fun » et pratique peut devenir une véritable souffrance selon qu’il s’agisse d’une situation choisie (flexibilité pour gérer un imprévu) ou subie.

Pour être honnêtes, reconnaissons que ceux qui en font l’apologie à l’extrême sont davantage dans le camp de ceux qui choisissent que de ceux qui subissent. Ceci dit le constat est là : en termes de pénibilité, de risques psychosociaux et de souffrance au travail il y a des barrières à poser et les RH ne peuvent abandonner ce sujet à d’autres ou rester trop longtemps dans l’expectative. Que nos lois doivent évoluer est une certitude. En attendant elles sont ce qu’elles sont, le risque sanitaire existe pour le salariés ainsi que le risque légal qui est son corolaire du coté de l’entreprise.

Regardez donc avec attention la fin de cette vidéo.


Jean Emmanuel RAY – Professeur de Droit à la… par Ziryeb

BYOD

Bien sur le « Bring Your Own Device » est un sujet DSI. Mais croire qu’il n’est que cela est une grave erreur. Pour certains cela participe d’une forme de « Well Being ». Par contre il est certain que c’est aussi un élément de marque employeur, un levier au service du marketing RH et de l’expérience employé. Mais il s’accompagne également d’une responsabilité nouvelle de la part de l’entreprise voire du salarié dans certains cas. Là encore un juste équilibre est à trouver entre le risque et le bénéfice : laisser faire est une erreur, tout prohiber n’a pas de sens et s’avère contreproductif. Là encore les RH doivent s’approprier le sujet afin de prendre des décisions informées, en connaissance de cause, plutôt que laisser le sujet à d’autres ou interdire systématiquement pour ne pas avoir à se poser la question. C’est souvent un encadrement mal dosé dont une partie – une partie seulement mais une partie quand même – est porté par les RH qui fait que souvent le BYOD ne fonctionne pas.

Donnnées, Big Data, analytics

La tarte à la crème du moment mais une chose est sure on n’y coupera pas. Big Data HR, HR analytics…appelez ça comme vous voulez, les DRH vont comme leurs homologues d’autres fonctions devoir se doter d’une culture de la donnée. Et ce pour deux raisons principales.

La première est évidente. A la questions « désirez vous que les décisions relatives à la gestion et au développement du capital humain soient fondées sur des faits ou sur des intuitions ? » que répondez vous ? Surtout si vous devez assumer les décisions en question et les coûts associés. A la question « voulez vous vous vous jeter dans l’inconnu ou préférez vous qu’un modèle prédictif vous aide à en anticiper des conséquences de vos décisions » quelle est votre réponse ? Maintenant si les bénéfices des « HR analytic », des modèles prédictifs etc sont bien connus, ils représentent un vrai challenge culturel pour une fonction qui a longtemps considéré que la matière humaine, noble, ne saurait se transcrire en équation et en chiffres.

La seconde est la conséquence de la première. On va servir de plus en plus des données pour décider, pour piloter l’entreprise, dans tous les domaines. En matière de capital humain on voit bien comme le sujet est sensible, à quel point le besoin de confiance et de transparence sur la manière dont sont collectées et utilisées les données est important. Une culture et, surtout, une éthique de la donnée ne se décrètent pas et c’est le rôle des RH de travailler sur ces deux points. Préparer cela c’est préparer l’avenir, laisser le sujet en plan c’est laisser une bombe à retardement au milieu du bureau.

Marque employeur et « collaborateur social »

On a déjà parlé de marque employeur au travers du BYOD mais ça n’est qu’une dimension du sujet. Alors que la guerre des talents en général et des talents digitaux en particulier fait rage, vos collaborateurs sont vos premiers ambassadeurs ou vos premiers détracteurs, surtout lorsqu’on connait l’importance de l’effet réseau dans le choix d’un employeur. Encore faut il que la réalité vécue soit à la hauteur de la promesse et que ceux qui désirent partager leur expérience positive soient en mesure de le faire.

Là on se heurte à une énorme contradiction : tout le monde veut des ambassadeurs mais personne ne fait confiance à ses collaborateurs pour prendre la parole et incarner l’image et le savoir faire de l’entreprise. Et lorsque l’employeur est « ouvert » c’est le collaborateur qui ne se sent pas prêt, qui à peur de faire une boulette malgré sa bonne volonté.

Il n’y aura pas d’entreprise sociale et digitale sans, avant toute chose, des dirigeants, managers et employés capables d’incarner et porter cette nouvelle réalité. C’est l’acculturation digitale des collaborateurs qui ne sont pas si en retard en la matière qu’on veut bien le croire. C’est la question de l’employé ambassadeur de son entreprise.

 

Voilà…c’est assez pour une première passe, la suite la semaine prochaine.

 

 

 

 

Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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