On en parle en entreprise mais le référendum de dimanche dernier et ses conséquences sur la vie de notre pays montrent que c’est toute la société qui est en proie au même problème. Certains parlent d’incapacité à se remettre en cause, moi je parlerai de peur de changer.
Multiples sont les freins qui bloquent la remise en marche de notre économie et du marché de l’emploi, mais cela concerne aussi les entreprises dans leur manière d’envisager leur rôle tant économique que social et également les individus que nous sommes, prompts à proposer les changements les plus radicaux…tant que cela ne concerne que les autres.
Qu’en penser, et existe-t-il une sortie à cette impasse.
Nous ne reviendrons pas sur les multiples théories du changement en entreprise, d’autres on écrit de véritables bibles sur le sujet et j’estime qu’en la matière il n’existe pas de solution miracle: il faut faire preuve de sensibilité, de pragmatisme et mettre en place des accompagnements « sur mesure ».
Mais qu’en est-il au niveau de l’individu? En ce qui me concerne je me moque bien d’être surprotégé par la legislation sociale dans la mesure où je suis sur de retrouver un travail dans la semaine qui suit. Ce n’est pas le cas, malheureusement et cette surprotection vécue comme un frein par les entreprises est une des causes du malaise que connait le marché de l’emploi. Elle a les effets inverses de ses objectifs.
Perdre son travail, changer de fonction, devoir déménager, parfois même changer de bureau dans la même entreprise, voire changer le modèle de la machine a café sont autant de situations qui entraînent refus et blocages. Pourquoi donc? Je reste convaincu que le phénomène est essentiellement culturel. Par exemple les anglo saxons vivent beaucoup mieux que nous ces étapes désormais fréquentes dans la vie de chacun. Je le remarque chaque jour au cabinet: un candidat en phase de transition de carrière, de repositionnement professionnel a peur, peine à faire le deuil de ce qu’il pert. A contrario on pourrait penser, et c’est mon optique, que c’est l’occasion idéale de reconstruire quelque chose de mieux. Un spécialiste a qui je m’ouvrais à ce sujet m’a répondu: « effectivement mais tu es en avance. Le jour où l’on comprendra, après une phase de deuil nécessaire et légitime, que c’est l’occasion idéale de reconstruire et de partir vers l’avenir, un grand pas aura été franchi ».
A nous donc de faire passer le message et de savoir s’en souvenir en entreprise. Comprendre, expliquer, mobiliser, refonder, mettre en mouvement pour créer l’opportunité.
Car ce n’est pas tant ce blocage que je regrette, c’est le fait qu’il sclérose et détruise peu a peu la volonté de l’individu qui, ayant perdu quelque chose, pense qu’il ne le retrouvera jamais. Rare sont ceux qui ont la démarche de dire « chouette, et si c’était l’occasion de sortir de ma routine et de faire mieux ». Au fil des échanges que j’ai pu avoir avec des interlocuteurs étrangers je suis conforté dans l’idée que ce phénomène est essentiellement culturel. Il me semble que c’est Paul Valery qui disait « les français marchent en arrière en regardant dans le rétroviseur ». Rien n’est plus vrai et cette incapacité à se dire que l’avenir peut être meilleur que le présent, alors même qu’il reste a construire est pour le moins inquiétante pour nous, nos entreprises et donc pour le pays entier.
Que de gens sachant qu’ils n’ont pas la vie qu’ils veulent mais qui, pour créer les conditions de la réussite, devraient quitter leur routine, changer leurs habitudes de vie, se remettre en cause, remettre en cause leur environnement, continuent à gémir sur leur cas sans avoir le courage de changer. Alors que c’est de leur vie et de leur avenir qu’il s’agit.
J’ai souvent du changer pour m’adapter à la situation. Changer de vie, d’études, de positonnement, parfois d’amis, d’habitudes et à chaque fois cela a été dans l’optique d’être en accord avec mes projets et mes objectifs. Et aussi pour ne pas avoir de regrets, agir plutôt que se plaindre. Et finalement il me semble en être toujours sorti gagnant. Même si cela est parfois difficile d’expliquer à ceux qui vous entourent que vous allez désormais adopter d’autres habitudes, d’autres comportements.
La seule conclusion que j’en tire c’est que lorsque le changement est imposé il est plus dur à vivre, l’adaptation se fait moins. A contrario lorsque j’ai pu anticiper et provoquer le changement de moi-même, la transition a été plus simple, le gain plus important.
Alors le changement: perte ou opportunité? Opportunité à coup sur à condition qu’on ait la volonté de le considérer comme tel. Opportunité si on a le courage de le décider avant qu’il nous soit imposé. Opportunité enfin si ceux qui le décident pour nous savent nous accompagner dans la transition.
Que le changement engendre un peur est humain, qu’il engendre un blocage est la preuve d’une sclérose.
Alors n’ayont pas peur du changement, provoquons le même.