Journée KM et stratégies Web 2.0: entre espoir et inquiétude

idàƒ©eDepuis le temps que je le promettais, ma synthèse des deux évènements auxquels j’ai assisté ces dernières semaines, avec par ordre d’entrée en scène la journée projets KM de l’ENSAM puis la conférence Stratégie Web 2.0.

J’ai été tout simplement impressionné par la journée à  l’ENSAM. J’y ai vu des projets brillamment réalisés et présentés par des étudiants passionnés sous la houlette, il est vrai, d’un mentor on ne peut plus motivant. D’ailleur cette journée aurait pu s’appeler Stratégie KM et ce pour diverses raisons:

– on part de la prise en compte de la dimension stratégique de l’utilisation de l’information

– on met en évidence des besoins

– on cherche les outils adéquats à  la mise en phase des besoins de l’entreprise et de la capacité d’apport des collaborateurs

– on élabore une solution « sui generis »

– on la déploie.

Et devinez quoi? à” miracle, on débouche sur des outils très « Web 2.0 » car une gestion de la connaissance pour être efficace doit miser sur une profonde dimension collaborative. Notons bien qu’on débouche sur des solutions « 2.0 » non pas parce qu’on a voulu être « up to date & in the mood » mais de manière réfléchie sans avoir au départ l’idée a priori d’aller dans ce sens, ce qui prévaut étant la satisfaction d’un besoin quasi stratégique. A la limite les entreprises concernées, telles monsieur Jourdain, faisaient du 2.0 sans le savoir ce qui, a mon sens, est la bonne solution. Peu importe l’outil et la manière dont on le classifie, ce qui compte est ce qu’il apporte. La meilleure preuve en est que dans un amphi peuplé de personnes sensibles à  la matière et aux nouveaux outils, le sondage « savez vous ce qu’est le web2? » a bel et bien montré que seule une très faible minorité savait de quoi on parlait. Alors imaginez devant un parterre de décideurs « conventionnels », le temps passé à  expliquer le web2 quitte a faire peur, inquiéter ou braquer les technophobes…que de temps perdu alors qu’une approche « a quoi ça sert, ce que ça apporte » se terminant par « au fait on commence à  appeler ça le web2 » serait, à  mon sens, beaucoup plus cohérente.

Tout cela pour arriver à  Stratégies Web 2.0. On y a vu la présentation de nombreux outils, plus ou moins connus du grand public. Je mentionnerai tout d’abord l’intervention d’Alain Lefebvre qui a fort justement lancé son propos en faisant remarquer que les technologies dont nous parlions tous étaient inconnues et peu utilisées de 95% de la population. Par contre il a intelligemment démontré que leur utilisation répondait aux préoccupations de 99% d’entre nous.

Pourquoi mettre cela en évidence? Car si la journée de l’ENSAM a fait naitre en moi l’espoir (voire la certitude) que de nouveaux outils allaient prendre de l’importance car fondés sur des technologies qui permettent d’adresser des besoins rééls. Dans cette logique on admet que l’utilisateur final n’a que faire de la technologie, seul le résultat final important, certaines interventions de cette seconde manifestation ont, en dehors de la grande qualité des projets présentés en termes de réalisation, fait naitre chez moi ce qui ressemble fort à  une légère inquiétude dont l’avenir dira si elle est fondée ou pas.

En effet j’ai eu du mal de trouver la fameuse stratégie. J’ai un gros défaut qui est que lorsqu’on me montre un outil ou une techno je demande toujours « a quoi ça sert ». En l’occurence, ici, à  quoi X peut servir à  une entreprise. Je n’ai vu que des stratégies de lancement de produit, peu d’outils au service d’une stratégie d’entreprise si ça n’est de celle qui a conçu le produit. Alors, tout n’étant pas si noir, chapeau bas à  Aubay et au ministère des affaires étrangères pour leur Framework de développement (en plus avec un ministère qui se met sur des solutions d’avant garde c’est d’autant plus beau), merci à  Alain Lefebvre d’avoir pensé « usages individuels », mais pour un blueKiwi présenté uniquement sous l’angle de la plus value engendrée par son utilisation (il me semble que ce sont les seuls à  avoir parlé de ROI) combien de présentations axées uniquement sur les technologies sur lesquelles reposent ces outils? A en avoir la migraine. Je ne suis pas sur qu’un chef d’entreprise « classique » désireux d’en savoir plus soit reparti en se disant que l’utilisation de services 2.0 pouvait servir sa stratégie d’entreprise.

Ca n’est pas un reproche que je fais à  l’évènement mais un constat. Les organisateurs ne sont pas responsables du discours des participants d’une part, et ma réflexion va bien au delà  de l’évènement mentionné où globalement ça se tenait quand même. C’est plus un sentiment général.
Pourquoi cela m’inquiète? Parce qu’on a l’air de repartir dans un modèle que nous avons malheureusement déjà  connu. Mettez du RSS et de l’AJAX ou vous voulez, et « Oooahhh c’est 2.0, c’est trop cool, c’est trop fort ». Ca sert à  quoi? A rien, mais y’a de l’AJAX. A tel point que même lorsqu’un service, un outil, peut engendrer un réel ROI ça ne fait pas 2 lignes dans un powerpoint dédié au Dieu techno.

Quitte a jeter un pavé dans la marre, le 2.0 c’est « purely bullshit » sans plus value derrière: amélioration des usages, traitement de l’information, mise en adéquation des outils avec de nouveaux process managériaux et organisationnels collaboratifs…et valorisation de tout cela. On va dire que j’exagère…oui c’est vrai et volontairement. D’autres l’ont remarqué également.
Des beaux projets il y en a à  foison, un simple tour à  Capital IT suffit pour s’en convaincre. Mais à  vendre de la techno pour la techno sans utilisation ni usage générateur de plus value on va encore finir par jeter le bébé avec l’eau du bain et là  c’est dommage pour tous ceux qui ont développé un projet dans une optique de satisfaction d’un besoin.

Les choses ne valent que par l’usage qu’on en a, et puisqu’à  un moment il faut bien mettre la main au pot, des usages valorisables. Si on perd cette condition de vue et que le label 2.0 devient un foutoire assimilable à  ce qu’on a pu voir à  la fin des années 90 (avec les conséquences que l’on sait) on aura encore réussi à  casser un beau jouet.

2.0= service permettant de mettre en place des usages et des process valorisables fondés sur des principes d’échange et de collaboration. En tout cas, selon moi. En tout cas hors de question de le définir en fonction de sa composante technologique.

Cela correspondait bien à  l’esprit de mon projet « management 2.0 » mais à  ce rythme je vais bientot être contraint contre mon gré de lui trouver un nouveau nom, crédibilité oblige.

Autre avantage de cette définition: lorsqu’on présente un projet à  un décideur, plutot que de le lasser à  lui expliquer le « 2.0 » pendant 3 heures avant de lui parler du projet, on lui montre d’abord ce que ça apporte et ensuite on peut glisser que « ce type d’outil est communément appelé 2.0 parce que… ». Et si on ne trouve pas d’usage valorisable à  présenter? Et bien on range le projet dans les cartons.

Une dernière analogie? Vous pouvez m’expliquer comment sont programmés les multiples puces et calculateurs qui truffent nos automobiles, comment chacun fonctionne, quel est son rôle? Non? Bien évidemment, la seule chose qui nous préoccupe est de savoir que notre voiture roule, peu importe ce qui se passe sous le capot. Alors gardons la même logique vis à  vis de nos futurs partenaires et clients.

Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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