Force est de constater que la théorie de Mc Gregor, si elle a influencé certains auteurs et a inspiré nombre de managers, n’a pas eu pour effet de changer de tout en tout le monde de l’entreprise. A cela plusieurs raisons.
La première, toute simple, c’est que si aujourd’hui motiver ses collaborateurs en les valorisant, en donnant du sens à leur mission, si se rendre compte que l’entreprise est une masse d’intelligence à organiser et que c’est l’entreprise qui doit devenir intelligente au delà même de ses hommes est une tendance lourde (reste à ce que la volonté affichée se traduise dans les faits)…c’est tout simplement que cela relève de plus en plus du simple bon sens et que beaucoup de managers, à l’instar de Monsieur Jourdain, font du Mc Gregor sans le savoir.
A ceci une raison: le contexte. Mc Gregor écrit en pleine époque industrielle marquée du sceau du Taylorisme triomphant, méthode qui a porté ses fruits dans son contexte. Aujourd’hui dans une économie de la connaissance davantage marquée par la capacité d’une personne à occuper un poste en fonction de son apport et non plus de sa capacité à apprendre à répeter une tache simplifiée à l’extrême, on redonne la primauté à l’individu sur la tache avec par conséquent davantage de prise en compte de ce premier. On soigne son collaborateur au lieu de graisser la machine outil…mais pour les mêmes raisons. C’est en tout cas ce qui résulté des modèles managériaux en pratique dans nombre d’entreprise, l’apport de Mc Gregor a été assimilé par la force des choses et par bon sens sans qu’on s’en réfère spécialement à lui.
D’accord tout n’est pas rose, et nombre de X hantent encore les entreprises. Et pour cause: l’entreprise a beau vouloir mettre en place un modèle de type Y…l’Homme reste l’Homme et manage selon ses gouts. On perd difficilement les habitudes prises et le comportement X est le reflexe naturel d’une personne à qui l’on confie des responsabilités et qui manque d’assurance: vouloir trop controler pour se rassurer.
Restent également des questions quasi culturelles: montrer qui est le chef, asseoir un statut…compréhensible en soi, contre productif à la longue….on appelle ça communément le syndrome du petit chef.
Enfin reparlons de l’ami Maslow…concrêtement Mc Gregor adresse les 3 étages supérieurs de la pyramide. Pour qu’une équipe soit « Y compatible » il faut qu’elle ait assouvi ses besoins de survie et de sécurité. Inutile donc de faire du Y avec des salariés sous payés, dans une entreprise à la vision et à la stratégie floues: le besoin de sécurité n’est pas réglé donc tout le monde revient à la case départ…ou presque.
De plus, dans la société actuelle, on a quelque peu redécoupé la pyramide: le besoin d’estime est permanent même pour les débutants ou les taches subalternes et la civilisation des loisirs et du temps libre fait que beaucoup recherchent leur réalisation personnelle dans l’extra professionnel. On peut n’avoir gravi que deux étages de la pyramide et se réaliser dans un projet humanitaire lors de ses RTT par exemple… Il faut donc repenser Mc Gregor dans un cadre plus large permettant la mise en place de nouvelles pratiques sociales pour tous et en toutes circonstances sous peine de voir le modèle managérial s’effondrer dès que l’entreprise traverse une zone de turbulence. Et faire en sorte que les Rh travaillent davantage sur le besoin de sécurité afin de permettre d’escalader les autres marches.
Enfin Mc Gregor ne pose pas tant une manière de manager qu’une vision de l’homme: manque de confiance et de considération pour les autres égalent X, confiance, respect, prise en compte égalent Y.
Conclusion
Considérant que l’économie actuelle porte en elle les conditions de mise en place de la théorie Y (car recentrage sur l’individu et non sur l’outil de production)…
Partant du principe que le management2.0 et les outils collaboratifs reposent sur une philosophie Y, un point clé de l’adoption de ces pratiques et outils est donc, avant même de penser à de nouvelles pratiques managériales, de travailler à développer la confiance envers l’autre…et ensuite prendre conscience de l’intérêt d’opérer autrement.
Autre conclusion: une théorie fondée sur des rapports humains doit s’appuyer sur ce qui fonde les rapports en question. A l’heure de l’économie de la connaissance où l’outil de communication/information remplace la machine outil, ce sont aux systèmes supportant les dites informations et communication de contenir le tereau nécessaire à la pérénisation de nouvelles pratiques.