Il est des termes comme cela que l’on emploie tellement qu’à la fin on se demande quel est leur vrai sens. Et où l’on se rend compte que tout le monde n’en a pas la même conception, et qu’en plus cette conception est amenée à varier avec le temps. Soyons « modernes » et jetons un œil sur la définition qu’en donne wikipedia :
Le management est la gestion d’un groupe, d’une organisation afin d’accomplir un objectif. Bien que le terme anglais management ait été adopté par l’Académie française avec une prononciation francisée, l’Office québécois de la langue française ne recommande pas l’emploi de cet emprunt intégral à l’anglais qui n’ajoute rien de plus que les termes gestion et administration.
Nous voici bien aidés.
Que veut dire « gérer ». Je me souviens d’un ancien prof (de management justement) qui ne cesser de repêter que « gérer » ne voulait rien dire. Cela voulais justement aussi bien dire « administrer » dans le sens le plus administratif du terme qui soit, ou « faire en sorte que les choses arrivent »…ce qui est d’un tel vague que je vois mal comment s’appuyer là dessus.
J’ajouterai que par déviation le management est rapidement arrivé en France avec la connotation de commandement. Je me souviens d’ailleurs avoir lu quelque part que les premiers pas de la discipline dans notre pays ont été fait sous une appellation du style « art et méthode de commander ». Dire que le manager est celui qui a le pouvoir est une certaine réalité (mais pas si vraie et absolue qu’on voudrait bien le croire), dire que manager c’est commander est une erreur gravissime à l’heure actuelle.
Manager une équipe d’ouvrier en 1930 et une équipe de cadres en 2006 sont elles deux choses comparables ? Oui par leur finalité, non par leurs modalités. Et c’est là que le bt blesse souvent.
Le manager fixe des objectifs et donne les moyens de les atteindre. Or on reste trop souvent dans un schéma « Command and Contrôl » où l’on se focalise sur le début et la fin…sans s’occuper du milieu. Donner les moyens de les atteindre…qu’est-ce exactement ? C’est amener les managés à avoir à disposition ce dont ils ont besoin pour atteindre l’objectif. Et les moyens en question sont matériels (ordinateur, téléphone, bureau…électricité), immatériels (données, informations) mais également organisationnels (possibilité de s’organiser au mieux, pragmatiquement par rapport à l’objectif poursuivi et au contexte, de manière à favoriser efficacité et réactivité).
Pour le matériel…on maitrise bien depuis plus d’un siècle (quoique…), pour l’immatériel on a encore beaucoup de mal (si mon équipe a la possibilité de savoir alors je perd mon pouvoir, c’est moi qui détermine ce qu’ils sont en droit de savoir)…quant à l’organisationnel j’ai bien peur qu’on en soit au stade de la préhistoire.
Ne cherchez pas ailleurs ce qui fera que dans quelques années certains auront gagné, d’autres perdus.
On ne peut pas vivre dans un monde qui requiert des « décisions minute » et suivre un circuit de validation qui repousse toute initiative aux calendes grecques et qui fait qu’en fait de se positionner en leader on passe son temps à courir derrière les autres.
On ne peut pas maintenir des silos que l’on estime source de pouvoir alors même que l’on sait que l’on doit faire travailler ses équipes transversalement. Et leur demander de collaborer tout en spécifiant que toute initiative visant à impliquer une autre personne doit être validée (je signale que ce sont ces mêmes chantres de la validation qui s’étonnent d’être débordés de requêtes émanant de leurs subalternes…que l’on traite au passage d’incapables).
On ne peut avoir conscience que la réussite passe la l’acquisition ET l’utilisation de connaissances, d’information, et restreindre les accès internet.
On ne peut vouloir diviser pour régner, désinformer pour dominer, et isoler pour contrôler et amener à terme ses équipes à la réussite.
Quelles sont les clés du succès aujourd’hui : de la connaissance, de l’innovation, des synergies entre individus, la capacité à identifier les expertises pour chacun, et à identifier les problématiques pour les experts, la capacité pour une équipe informelle de se former en quelques minutes et non en quelques jours, d’agir en quelques jours et non en quelques mois et à se dissoudre d’elle même pour vaquer à d’autres challenges.
Mais si tout ce se fait ainsi le manager ne servirait plus à rien ? Si, bien au contraire, il serait là pour veiller à ce que les composantes matérielles, immatérielles et organisationnelles de la réussite soient réunies et sans cessa améliorées et renouvelées. Son pouvoir serait juste de nature différente : non plus (ou plus seulement) le pouvoir d’ordonner, contrôler et sanctionner, mais le pouvoir de donner aux individus ce dont ils ont besoin pour que l’équipe réussisse. Comme le dit un manager de mes amis « réussir en faisant réussir les autres, c’est cela notre mission ».
Le rôle du manager n’est pas de savoir mieux faire les choses que ses équipes, c’est de leur permettre de les faire. Comme je dis souvent, faire partie d’un orchestre et en être le chef ne demande pas les mêmes qualités…et le meilleur soliste ne peut pas prendre la baguette…comme le meilleur chef ne peut redescendre dans la fosse avec un violon à la main. Chacun son job, ce qui importe c’est la qualité de l’interprétation.
Un brin d’idéalisme ? Non, justement. Du pragmatisme et la volonté d’améliorer sans cesse la performance. L’économie a changé, les facteurs de succès ont changé (voir plus haut) alors les leviers doivent changer également. Mais comme toujours le changement ne se fait jamais facilement. Posez vous une seule question « ai-je peur de réussir à atteindre mes objectifs, rendre mes équipes performantes et développer la performance de mon entreprise » ? Bien sur que non, au contraire, vous en mourrez d’envie.
D’ici là d’ailleurs peut être ne dira-t-on plus manager mais « responsable des interactions ».
Et rassurez vous, la hiérarchie perdurera car elle est essentielle à la vie de l’entreprise. Elle s’exprimera juste différemment.