Créer une mémoire d’entreprise c’est raconter de belles histoires

Je crois à  l’importance des « conversations » pour capter le savoir informel de l’entreprise, les best practices, tous ces éléments qui font partie du patrimoine des individus et qui ne peuvent être captés et restitués qu’en stimulant la mémoire de l’individu, en fonction du principe selon lequel la forme la plus accessible de connaissance est la conversation.

D’où l’intérêt de mettre en place les outils qui permettent ces discussions ouvertes et leur stimulation a une grande échelle, ainsi que leur capitalisation.

C’est d’ailleurs le plus souvent sous l’angle des best practices et de ce qui sert immédiatement à  supporter la fonction business que j’envisage ce transfert. Je pense qu’il n’y a pas grand chose à  ajouter sur ce point précis à  tout ce que j’ai déjà  pu dire par ailleurs.

Mais cette note de Scott Monty m’a fait penser à  une autre dimension qui donnerait toute sa dimension à  la notion de mémoire d’entreprise, allant au delà  du management du savoir pour intégrer la dimension de la culture d’entreprise.

Le principe de la plateforme Linkory dont il parle est simple : connecter les individus via leurs souvenirs et, quelque part, participer à  la création d’une Histoire partagée.

Je parle beaucoup de culture d’entreprise ces temps derniers tant c’est un élément capital à  la fois de l’identité, de la capacité à  évoluer et de la performance des organisation. Une parte essentielle de la culture est composée des « histoires », « mythes » qui forgent une identité commune, expliquent le présent.

Quand une personne intègre une entreprise il est essentiel qu’elle s’approprie ses codes fondés sur ces fameuses histoires. C’est souvent le rôle des anciens qui expliquent ce qui s’est passé à  telle ou telle occasion, comment un dirigeant, un manager a gagné la confiance de ses collaborateurs par son comportement lors d’un évènement…tout ce qui permet de comprendre ce qu’est l’entreprise aujourd’hui, la raison de certaines règles implicites, ce qu’on peut faire et ne pas faire.

Tout le monde voit l’intérêt de capitaliser des histoires telles que « je me souviens comment j’ai réglé tel situation difficile avec tel client, comment j’ai organisé mes équipes face à  telle situation difficile, comment j’ai trouvé le moyen de signer tel contrat », « comment j’ai réorganisé la production le jour où telle machine est tombée en panne », « comment j’ai maintenu nos livraisons un jour de grève des transporteurs »… Je pense également que des « je me souviens du jour où….untel a fait ça, où tout le monde s’est mobilisé autour d’une situation de crise, ou tel dirigeant a eu ces mots devant ses équipes… » seraient tout aussi utiles car elle permettent aux nouveaux arrivants de s’imprégner de l’histoire de l’entreprise, d’en comprendre les codes et les règles implicites, bref de faciliter le partage des valeurs et l’implication.

Quoi qu’il en soit, un point commun demeure : on ne parle pas de connaissance brute que l’on peut ranger des dans des cases mais à  des récits fortement liés aux individus, au contexte, à  l’expérience. Parfois il s’agit de choses dont on ne mesure même pas l’importance pour les autres et qui nous reviennent à  l’esprit lors d’une conversation. Il s’agit de moments d’une vie professionnelle qui se racontent à  la première personne.

Parfois j’entend : « on ne paie pas les gens pour discuter ou animer des discussions ». C’est dommage, c’est autant de savoirs qui se perdent et dont on reparlera quand tout une génération partira à  la retraite. Même ceux qui ont peu de savoir ont souvent beaucoup d’expérience et de souvenirs. Quoi qu’il en soit on chiffrera les pertes dues aux non conversations à  ce moment là .

Certains commencent d’ailleurs à  faire les comptes : la NASA, comme me racontait Claude Malaison, se retrouve incapable de retrouver l’expertise permettant d’envoyer un homme sur la lune. Bien entendu la documentation technique reste, mais le savoir faire et l’expérience de ceux qui l’ont fait, leurs « trucs », la manière dont ils ont fait face à  certains problèmes est partie avec eux à  la retraite. Dommage…

Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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