Courrier des lecteurs : qui cherche une baguette magique dans les nuages ne récoltera qu’une mauvaise averse

Il arrive parfois qu’un lecteur au lieu de laisser un commentaire ou repartir avec ses doutes pose une question par email. Et il en est une qui revient tellement souvent qu’une réponse publique s’impose.

De manière générique elle se présente comme suit :

« Monsieur,

Je suis avec attention tout ce qui se dit aujourd’hui sur l’entreprise et le web 2.0. Autant vous dire que le manque de partage d’information, la surcharge d’email, le fait que les bonnes idées ne remontent jamais sont autant de situations que nous vivons au quotidien et contre lesquelles je pense qu’il faut agir pour le bien de l’entreprise. Il est évident que nous devons apprendre à  fonctionner quelque peu différemment.

Par contre j’ai un peu de mal de voir comment tous ces outils, ce « cloud computing », ce web 2.0 vont faire en sorte de changer la manière dont mes équipes travaillent.

Si vous aviez quelques informations pour éclairer ma chandelle…

Cordialement

xxxxxxx ».

Alors on pourrait déjà  commencer par expliquer la différence entre les outils en tant que tels et le « cloud computing » qui est plutôt relatif à  leur mise à  disposition, dire que l’entreprise n’est pas le net, que….

Mais le plus important n’est pas là .

La problématique est bien identifiée avec des besoins opérationnels concrets. Les bons outils sont également identifiés. Le problème est la question de la baguette magique à  savoir le « je mets des outils en place, je ferme les yeux, je les rouvre, et d’un seul coup ce qui aurait nécessité une démarche de change management, de communication interne, parfois de coaching n’a plus de raison d’être. » Je suis au regret de vous informer que la fonctionnalité « baguette magique » n’a jamais été implémentée dans aucun outil.

Mais cela n’a rien de nouveau :

– le mail n’a jamais fait poussé les gens à  échanger : il a répondu à  besoin d’échanges rapides et fréquents.

– un erp n’a jamais changé aucun process : on  paramétré l’erp pour coller à  l’existant ou on a profité de l’erp pour redessiner l’existant.

– on ne crée pas des bases de données en espérant que quelqu’un va les remplir mais parce quelqu’un a besoin d’un tel outil

On en revient donc aux fondamentaux : comme Bell Canada nous l’a appris « un outil ne résoud pas des problèmes qui sont humains par nature » et de manière générale tous ceux qui se sont frottés à  la question des communautés de pratiques ont appris, parfois à  leurs dépends, que si une communauté dispersée avait beaucoup de mal à  vivre sans l’outil adéquat, l’outil ne créait pas la communauté de lui même, ex-nihilo.  Ou comme je le disais il y a près d’un an lors d’une conférence « au lieu de vous demander comment faire adopter des outils 2.0 en entreprise demandez vous d’abord pourquoi ».

Bref, à  croire qu’une baguette magique se cache dans les nuages, on risque fort de prendre une mauvaise averse en allant la chercher. Par contre on peut y trouver le soleil, ou toute condition météo favorable à  la performance de chacun en se demandant :

– comment on mettrait les choses en place si on partait d’une feuille blanche.

– mesurer les écarts avec l’existant (ce qui permet également de se rendre compte que tout n’est pas à  jeter loin de là )

– réduire les écarts : c’est à  dire rendre les choses possibles. C’est du management, de la communication, des rh, un brin de process… et quelques bons outils qui facilitent le tout et montrent que c’est possible et que tout cela a du sens pour les utilisteurs.

– passer à  la vitesse supérieure : parce qu’une fois que tout cela fonctionne on vous demandra d’aller plus loin dans l’outillage car un vrai besoin (et donc un manque…) existeront.

Ce qui revient, plus simplement, à  se dire :

– quels sont les besoins des collaborateurs en termes d’échanges pour faire leur travail au quotidien ?

– comment faire naitre les manières d’échanger en question dans la vie réelle avant même de penser à  les virtualiser.

– qu’est ce qui est traité par des applications métier dédiées ?

– comment on optimise le reste, ce qui soit ne transite pas, soit transite en vrac dans des boites email ?

– et une fois qu’on a rendu les choses les plus simples, les plus évidentes, celles qui ont le plus de sens, plus simples, on passe à  des utilisations plus évoluées correspondant à  des choses ayant du sens pour l’organisation mais que les collaborateurs ont du mal à  appréhender avant car trop nouvelles pour eux.

Les outils ne changeront pas la manière dont les hommes travaillent. Ils la supportent et lui sont indispensable, ce qui fait qu’elle leur est donc préalable. Et vu les enjeux, c’est déjà  énorme.

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Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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