Aujourd’hui tous les avis convergent pour admettre deux choses :
dans le cadre de ses activités traditionnelles l’entreprise a besoin de plus en plus de réactivité afin de faire face à des situations de plus en plus complexes, à la prévisibilité aléatoire et nécessitant des assemblages adhoc de ressources, de compétences pointues, à mettre en place rapidement et pour des durées relativement courtes. En quelque sorte des forces spéciales pour des opérations coup de poing qui opèrent en parralèle de la coopération institutionnalisée qui est le « fond de roulement » de la vie de l’entreprise.
pour faire face à ce besoin la nécessité de disposer des compétences et expertises adéquates;
Force est de reconnaitre que pour ce qui est du travail « institutionnalisé » on atteint des niveaux de performance impressionnants et que l’optimisation des process n’a pas été de l’argent jeté en l’air. Pour ce qui est des compétences, des expertises, elles sont là également. Pour ce qui est de la capacité à monter des équipes adhoc performantes quasiment auto organisées le besoin est clairement identifié mais on peine de plus en plus à le satisfaire eu égard au nombre sans cesse croissant des situations ou ce mode de fonctionnement est requis.
Une des raisons à cela est que si ce que nous appellerons capital intellectuel est présent il est difficilement accessible et ses détenteurs sont rarement identifiables. Pour y arriver il faudrait que l’expérience soit « trouvable » et la « trouvabilité » ne peut venir que de la mise à l’écrit de cette expérience car l’écrit est encore (et pour un bout de temps) le mode de recherche le plus adéquat dans un système informatique, le dit système étant le seul espace commun partagé par les employés d’entreprises sans cesse plus éclatées. On pourrait ainsi chercher dans l’expérience elle-même et si on ne trouve pas les réponses adéquates identifier tout de même des personnes référentes en la matière qu’on pourrait alors solliciter.
Tout cela ne recouvre ni plus ni moins qu’une problématique de disponibilité de l’information qui s’analyse (bonjour monsieur La Palice) en termes à la fois d’information et de disponibilité.
En termes d’information il s’agit de capitaliser les « savoirs mous », non plus seulement ce qui est avéré, structuré, validé et estampillé de l’imprimatur corporate mais les micro savoirs actuellement disponibles dans les boites mail, sur des mémos personnels, et plus généralement dans la mémoire des collaborateurs.
Cela implique par conséquent une nouvelle source de savoirs à officialiser (le collaborateur) et un nouveau mode de captation de l’information qui ressemblerait davantage à du storytelling.
On me répondra que si c’était possible on l’aurait fait depuis longtemps. Sauf qu’il faut des outils appropriés et que c’est là que réside l’intérêt des outils web 2.0. Ils sont de nature à capter et rendre disponible cette information non structurée là où les outils classiques de partage de savoir montrent leur limite (en la matière en tout cas) car imposant justement une structuration non appropriée et chronophage pour des informations dont ça n’est pas la nature.
Quand bien même tous les enjeux évoqués ici seraient pris en compte par une entreprise et si elle s’efforçait de les traiter, le point faible de toutes ces démarches réside en effet dans la disponibilité de l’information faute d’outils pertinents pour ce type de savoir donné.
Un exemple en matière commerciale ? Un CRM permet en gros de répondre aux questions suivantes : qui, combien, quand ? La méthodologie de vente permet de répondre partiellement au comment. Et quid des informations qualitatives (points d’achoppement, détails sur le contexte propre au client, à l’affaire…) ? Elles sont essentielles pour comprendre tout ce qui se passe lors du cycle de vente mais sont indisponibles sauf à les demander aux commerciaux. Cette information est alors délivrée de manière orale, voire par email, ce qui fait qu’une personne affrontant les mêmes problèmes ou intervenant sur le même compte n’y aura pas accès et qu’elle devra à son tour se lancer dans une démarche de spéléologie informationnelle afin de trouver des réponses à ses questions. Et pour ce qui est de savoir, quelques temps après comment telle entité à remporté un contrat dans un contexte difficile afin de répliquer le même succès dans un contexte similaire, autant chercher une aiguille dans une meule de foin.
On peut appliquer le même raisonnement à l’innovation. Des idées il y en a plein l’entreprise. Mais les rendre identifiables et faire que l’entreprise peut s’en inspirer et les mettre en œuvre est une autre paire de manches.
Bref, sans améliorer la disponibilité qui se compose à la fois de la captation et de la mise à disposition, une grande partie du capital intellectuel ne peut être mis à profit par l’entreprise.
Tout cela est bien joli mais vous préféreriez sans doute une réflexion orientée création de valeur.
Partant du principe reconnu que les actifs intangibles participent à la création de valeur sans que beaucoup ne sachent trop comment ni pourquoi, après avoir jeté un oeil sur cette note, sachez que l’impact de ces actifs sur la valeur dépend de :
L’alignement : bien sur il faut des compétences, des savoirs, des idées en phase avec les besoins de l’entreprise. C’est le problème de l’entreprise, des managers et des RH.
L’utilisation de ce capital au sein des processus créateurs de valeur classiques. Par exemple rien ne sert d’avoir des idées si on n’a pas le processus permettant de les identifier et les mettre en oeuvre. Et de manière générale rien ne sert d’avoir des compétences si on ne sait les utiliser de manière spécifique où et quand on en a besoin.
La disponibilité de l’information qui rend le point précédent possible. Si l’on considère que l’entreprise a un besoin et que son capital intellectuel lui permet d’y répondre, c’est la disponibilité (information readiness pour Kaplan & Norton) qui détermine dans quelle mesure ce capital sera utilisable. Avec des outils structurants et top-down on doit être à 20% (la proportion de savoirs tangibles). Largement insuffisant dans une économie du savoir. Pour améliorer ce chiffre il faut donc mettre en place les processus mais également les outils adéquats. On n’arrivera jamais à 100% mais se dire qu’on peut exploiter non plus 20 mais peut être 40 ou 50% du capital intellectuel (qui a un cout) c’est quand même séduisant.
Les outils web 2.0 comme boosters d »information readiness » ? J’y crois d’autant plus que l’effet de levier sur des considérations purement financière est évident.