Récapitulons quelques problèmes. Nous vivons dans une société consacrée aux dividendes, à l’organisation, à la décision, aux ordres donnés de haut en bas, aux affrontements (chaque idée mise en avant ne peut que gagner ou perdre), et à une guerre sans merci pour détruire un concurrent, qu’il soit national ou étranger. Il faut qu’il y ait des vainqueurs et des vaincus. Ca n’est certainement pas le chemin qui mène à une nouvelle vie matérielle.
Nous vivons à une époque où tout le monde espère voire augmenter sans fin son niveau de vie. Parfois, un peu d’arithmétique aide à clarifier les idées. D’où provient l’afflux toujours plus grand de produits du monde entier qui fait augmenter sans cesse l’approvisionnement de denrées alimentaires, de vêtements, de logements et d’autres services ? Il est difficile de comprendre comment un développement économique important pourrait se réaliser aux Etats-Unis tant que nos produits ne deviennent pas compétitifs sur notre sol et dans le reste du monde.
Comment peut-il acheter les produits aux autres, celui qui n’est pas capable de leur vendre ses propres produits ? La seule réponse possible c’est une meilleure conception, une meilleure qualité, une meilleure productivité.
Seul un meilleur management peut apporter l’amélioration nécessaire. La grande question est de savoir combien de temps il faudra pour que le management assume enfin ses responsabilités et pour qu’une nouvelle attitude porte ses fruits. L’industrie américaine ne doit pas se préparer à une restauration mais à une transformation. La solution au jour le jour des problèmes et l’installation de gadgets ne mettront pas fins à nos difficultés.
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Un article de Business Week […] cite le cas paradoxal d’un cadre supérieur qui a été licencié d’une société alors qu’il avait été embauché pour diriger la planification à long terme. La seule raison était que les dividendes du 4e trimestre […] avaient fléchi.
Les dirigeants généraux ont réussi à faire croire aux actionnaires que les dividendes sont une mesure de la performance du management. Certaines écoles de commerce apprennent à leurs étudiants comment on peut augmenter au maximum les profits à court terme. […] Quand les dirigeants de l’industrie apprendront ils qu’ils ont l’obligation morale de protéger le capital ?
Cet article aurait pu être un article d’actualité.
Cet article aurait bien pu s’intégrer dans une logique de management 2.0. Meilleure conception des produits (crowdsourcing ?), meilleure productivité (réseaux sociaux ?), meilleure qualité (en agissant globalement plutôt que localement ? en s’attaquant au système plutôt qu’à l’individu en bout de chaine ?).
Cet article aurait pu être la suite de mes propos sur le social business, sur Antoine Riboud, au bon sens auquel nous ramènent les Propos de O. L. Barenton, confiseur, que j’ai lu lors de mes derniers vacances, la suite logique d’un raisonnement qui me pousse à dire qu’on ne prendra pas les bonnes décisions au niveau micro (entreprise) tant qu’on aura pas compris qu’on part sur une vision macro (marché) totalement erronée.
Je pourrais même vous faire croire que je l’ai écrit.
En fait vous pourrez trouver ces lignes que je me suis permis de recopier dans Hors de la crise de W. Edwards Deming. J’y ai retrouvé nombre de problèmes et points d’amélioration que l’entreprise n’a toujours pas réussi à traiter. Ah oui. J’avais oublié de vous dire : si « Out of the Crisis » est sorti en 1986, son édition originale (« Qualité, la révolution du management ») date de 1982. On y apprenait (entre autres choses tellement l’ouvrage est riche) qu’il importe de différencier les dysfonctionnements liés à l’homme (minoritaires) et dus au système (la quasi totalité), que tout commence chez le client et avec l’opérateur de production final (logique bottom up), que la plupart des indicateurs ne servent à rien, que le leadership est plus efficace que les objectifs, que la recherche du court terme met en péril la création de valeur à long terme et que rien ne peut se faire sans profonde révolution culturelle.
27 ans plus tard j’ai l’impression que les mêmes causes produisent une fois de plus les mêmes effets, de manière plus dramatique encore.