Cela fait maintenant quelques années que se pose la question de la « collaboration 2.0 ». Au delà des mots à la mode il ne s’agit ni plus ni moins que de permettre aux collaborateurs de mettre en œuvre des pratiques collaboratives dans un cadre plus informel, moins bordé par les rigidités organisationnelles, afin d’accéder plus facilement aux bonnes informations et aux bonnes personnes et résoudre les problèmes qui se posent dans le cadre de leur travail quotidien. L’objectif final n’est donc ni plus ni moins que de favoriser l’efficacité au quotidien dans l’exécution des tches et des projets sans qu’il n’y ait d’autres considérations philosophiques au départ. Et derrière les multiples formulations qui ont pu être utilisées pour éviter d’employer des mots « anciens » il ne s’agit en effet que de collaboration, à une échelle et selon des modalités nouvelles, soit, mais de collaboration.
L’expérience prouve également que l’implémentation d’un nouveau modèle est loin d’être chose aisée et qu’il n’est guère facile de le faire adopter aux utilisateurs. Mais ces modèles qui prennent en compte le point où veut les amener prennent ils en compte les contraintes souvent implicites qui sont les leures ?
Que nous disent donc les collaborateurs / utilisateurs ?
« Protégez mon workflow »
Dans un travail qui donne la part belle à l’utilisation des savoirs, les intéractions sont nécessaires non pas pour discuter mais pour réfléchir ensemble et se coordonner de manière cohérente. Pour cela le collaborateur suit une logique qui peut être informelle (manière de faire tacite adoptée par tous) ou très formelle (suivi d’un process ou d’un worklfow) qui est le fil rouge de son activité. Il ne peut passer son temps à passer d’un outil « structurant » à un outil de communication ou de collaboration, s’interrompre, revenir.
Les outils permettant cette collaboration doivent donc être fortement intégrés aux outils structurant le travail et les pratiques collaboratives, mêmes informelles, organisées autours du workflow personnel. Dans le cas contraire le collaborateur a tendance à refuser l’échange plutôt que rompre son flux d’activité habituel.
On peut voir l’incarnation de cette tendance dans Salesforce Chatter voire SAP 12sprints.
Différentes formes de collaboration mais un seul travail
Il y a différentes formes de collaboration et différents outils selon que l’on cherche à collaborer dans un contexte défini, structuré (une équipe identifiée, un objectif connu et des rôles identifiés) ou indéfini (avec des personnes que l’on ne connait pas pour faire face à un problème impromptu que l’équipe ne peut solutionner). Ce qui semble être quelque chose de clairement séparé au niveau macro ne l’est pas au niveau du collaborateur qui est en recherche d’une logique dans le passage de l’un à l’autre. Il ne voit, lui, pas cela comme une rupture mais comme une extension de son travail traditionnel.
En effet, au niveau individuel, le collaborateur n’a pas de logique 1.0 ou 2.0 et n’a cure de la distinction : ce sont différentes modalités lui permettant d’avancer dans son travail qui doivent s’enchainer avec cohérence et de manière subsidiaire (« lorsqu’une ne fonctionne pas j’essaie la seconde »). Ce qui ressemble a des objectifs différents vu au niveau macro (collaborer à perimètre défini ou indéfini) n’est qu’un objectif unique au niveau micro (faire son travail) auquel s’appliquent éventuellement des modalités différentes.
On doit lui proposer des principes clairs lui indiquant quand passer de l’un à l’autre et sous quelles modalités afin de le sécuriser, le rassurer. Et lorsque cela mobilise des outils différents, ces derniers doivent être fortement intégrés afin qu’il n’ait pas l’impression d’une rupture dans sa logique mais le sentiment de pouvoir agir de la même manière en ayant simplement la possibilité de mobiliser des ressources sur des périmètres différents.
Unifiez mes contextes
Le fait que le collaborateur ne veuille passer son temps à naviguer entre outils de « travail » et outils de communication / collaboration qui ne sont que des supports au travail, et entre différents outils d’un même type a une conséquence : il évolue et collabore dans de nombreux contextes mais ne veut pas que les contextes en question se traduisent par autant d’environnements sur son poste de travail. Collaborant et intéragissant autour d’informations il veut pouvoir les centraliser en un flux unique et structuré (voire priorisé) et initier des intéractions autour d’une information donnée, dans un périmètre donné à partir de ce flux unique. Idéalement autant vers l’intérieur de l’entreprise que vers l’extérieur.
C’est le mythe de la boite à lettres unifiée dont on a vu un avatar mal dégrossi arriver l’an dernier avec Google Wave qui malgré sa réalisation perfectible (en tout cas au regard des standards de l’entreprise) nous donne une vague idée de ce que à quoi l’avenir pourrait ressembler une fois que le concept sera mieux maitrisé. Il semblerait que l’avenir de Lotus Notes aille dans cette direction, mais gageons que beaucoup travaillent sur le concept actuellement et que beaucoup de produits allant dans cette direction devraient voir le jour dans les mois ou les années à venir.
Je dis souvent que l’outil ne fait pas le moine. Mais la manière dont les outils s’intègrent, communiquent et structurent l’information d’une manière non seulement transparente pour l’utilisateur mais qui permet aussi de passer de manière intuitive d’un contexte de travail à un autre est également clé dans l’adoption de nouveaux modes de travail par les collaborateurs.