Résumé : à l’aube d’une année qui s’annonce pour le moins difficile, les entreprises sont devant un choix cornélien. D’un coté les recettes traditionnelles pour se préparer au choc, d’un autre le sentiment selon lequel il ne s’agit plus d’encaisser le choc mais de le dépasser. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, conserver les mêmes structures et modes de fonctionnement alors que les cycles se raccourcissent et qu’il s’agit de s’adapter rapidement à des transitions de plus en plus rapides peut être une option perilleuse et le besoin de faire évoluer la nature même de l’organisation une option tentante. Quels seront les choix des DRH en 2012 ? Une récente étude montre une grande indécision, voire des choix contradictoires. Mais, derrière les mots, il faudra faire des choix capitaux pour l’avenir. Jack Welsh disait « Lorsque la vitesse d’évolution du marché dépasse celle de l’organisation, la fin est proche. » Sera-t-il entendu ?
Bizarre mais à” combien passionnante équation paradoxale pour les entreprises en 2012. D’un coté la crise les fait s’interroger sur l’avenir et les manières de s’exposer le moins possible à un risque bien réel. Ce qui, généralement, les conduit à ne rien entreprendre, geler les projets et se séparer de tout ce qui risque de les encombrer au moment du choc. Mais d’un autre coté il y a, en filigrane, cette sensation que cette fois-ci ça sera différent. Que les vieilles recettes ne fonctionneront plus. Que si on se contente de se préparer à amortir le choc en se disant qu’on repartira après…on risque de ne pas repartir. Qu’au delà de la crise économique il y a une crise des modèles managériaux, des modes d’organisation qui a justement entrainé les comportements erratiques qui nous ont emmené là où on sait.
Alors on a d’un coté le réflexe de se tenir coi, immobile, sans bouger et, de l’autre, la sensation qu’il faut se préparer à repartir autrement. Voire à aller jusqu’à envisager d’anticiper le choc autrement. Reste à savoir comment les entreprises en général et les DRH en particulier vont gérer cette apparente contradiction. Quelques éléments de réponse dans un sondage mené par TNS-Sofres pour Laisons Sociales et CSC que j’ai vu dans la presse la semaine dernière.
Quatre points principaux :
L’attraction et la conservation des talents est une priorité en léger recul (76% vs 80% il y a un an)
La formation passe à la trappe : 34% des entreprises vont diminuer leur budget formation
La transformation organisationnelle est la nouvelle priorité (80%)
Gel des embauches et réduction des effectifs sont de mise.
A coté de cela 78% des DRH estiment que les attentes de leurs directions portent sur l’efficacité du management et 59% sur le rôle des managers de proximité. Entre les deux le maintien d’un bon lien social est cité par 64% des DRH interrogés.
Quelles conclusions en tirer.
Le trio transformation organisationnelle, efficacité managériale et rôle des managers de proximité est assez cohérent et montre que plutôt que faire le dos rond on a décidé de s’adapter. Reste à savoir à quoi. Derrière ces belles phrases on a deux alternatives : se mettre en position de sécurité comme lors d’un atterrissage forcé ou réapprendre à voler.
Si on opte pour la seconde solution il est inquiétant de voire la baisse des budgets formation. Toute conduite du changement ne passe pas par la formation mais elle compte pour une partie du personnel qui va voir son rôle évoluer. Les termes évoqués (transformation) signifient ils qu’on va consacrer davantage de ressources à la conduite du changement ? Possible mais rien n’est moins sur. Une erreur magistrale serait de travailler sur la structure sans travailler sur les gens, de s’attaquer à la dimension process sans la transformer. Croire que les individus suivent l’organisation est une erreur. Ils l’accompagnent (voire la précèdent).
Par contre s’il s’agit d’un modèle qui va vers l’agilité, la résilience et une forme plus « organique » d’organisation on peut voir les choses sous un jour plus heureux. Avec ce qui nous attend et, quoi qu’il en soit, avec des rythmes économiques et des des cycles qui s’accélèrent, crise ou pas crise, il importe d’adopter des modèles agiles et résilients. C’est d’ailleurs l’absence de ces composantes qui fait qu’à chaque rupture de cycle on ira davantage vers la crise que vers un cycle nouveau en raison du temps nécessaire à faire son deuil d’une situation connue et maitrisée, à se projeter et envisager les choses sous l’angle des opportunités.
L’incapacité structurelle (tant au niveau des entreprises que des états…) à suivre le rythme imposé d’abord par l’économie du savoir puis par l’économie numérique a amené les entreprises à chercher leur croissance sur les marchés plutôt que dans l’excellence opérationnelle et de nouveaux business models. On voit les résultats aujourd’hui.
Comme le disait d’ailleurs Jack Welsh : « Lorsque la vitesse d’évolution du marché dépasse celle de l’organisation, la fin est proche. »
Alors ? Vers des organisations plus rigides amputées de leur matière vive pour faire face ou des organisations agiles et résilientes pour le dépasser ?
L’avenir le dira.