Entreprise résiliente ? Et quid du client ?

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Résumé : face des marchés en rapide évolution et des clients à  la fois exigeants et versatiles, l’entreprise doit rentrer dans une logique de résilience. Mais la relation client est une danse qui se pratique à  deux : comment rentrer dans une relation constructive avec d’un coté une entreprise qui ferait des efforts d’adaptabilité et des clients incapables de toute empathie. Si on imagine pas les communautés de clients faire d’efforts dans cette direction, les entreprises ont les moyens par plus de transparence, de dispositifs d’explication, d’information, de donner au client les éléments permettant de comprendre un contexte, faisant ainsi diminuer la tension en situation de crise et rendant plus faciles et productives les relations entre parties-prenantes.

Les marchés vont vite et se transforment à  une vitesse jamais vue. Dans ce contexte le client évolue tout aussi vite et fait preuve d’une exigence et d’une versatilité jamais vues, ce qui force l’entreprise à  rentrer non plus dans des logiques d’adaptation lourdes et espacées mais dans des logiques d’ajustement permanent. Ce qui, organisationnellement parlant, se traduit par des approches centrées sur la résilience plutôt que sur le changement.

Ceci dit on a également vu que, au niveau de l’empathie indispensable à  la résilience, le fameux social customer qui attend tant de l’entreprise se pose là . Coté entreprise la conclusion est évidente : oui il faut s’adapter mieux et, surtout, plus vite, mais dans le cadre d’une relation gagnant/gagnant ce serait également très bien si le client développait lui-même cette fameuse résilience pour être également capable de s’adapter à  des situations exceptionnelles sans forcément en rejeter la faute sur l’entreprise et refuser de comprendre son contexte.

De là  à  voir des communautés de clients se prendre en main pour décider d’organiser cette résilience collective et individuelle de leur coté car, finalement, la relation client est une danse qui se pratique à  deux et où en tant que partie prenante, au même titre de l’entreprise, ils ont des efforts à  accomplir, une partie du chemin à  faire et une responsabilité dans la qualité de la relation et se son résultat…il y a un pas qu’on s’abstiendra de franchir.

Mais à  l’inverse, l’entreprise n’a-telle pas sinon une responsabilité en tout cas un rôle à  jouer dans l’organisation de la résilience du client ? Il est impossible de réagir constructivement devant une situation que l’on ne comprend pas et, surtout, dont on ne comprend pas les facteurs externes qui la génèrent, l’impactent, la font évoluer. Si cela ne résoud pas tout, un travail de communication, d’explication en amont peut contribuer à  aider le client à  comprendre une situation, identifier les responsabilités, les facteurs impactants et ainsi éviter de s’en prendre à  ceux qui n’y peuvent rien, à  ceux qui sont autant victimes de la situation que lui et, au contraire, valoriser le travail effectué pour récupérer les choses plutôt que se plaindre de la non-normalité du service. Cela peut aussi aider le client à  bien jouer son rôle dans une situation qui tend de plus en plus à  être une situation de co-construction

On voit arriver des choses intéressantes qui peuvent préfigurer des tentatives dans cette direction. Avec Qui Fait Quoi Dans L’Aéroport, Aéroports de Paris aide justement le client à  avoir une vision systémique du fonctionnement de l’ensemble et identifier causes et responsabilités. Sur le même sujet et suite à  de nombreux « coups de gueules » en ligne lors des épisodes neigeux de 2009 et 2010, ADP m’avait également invité avec quelques autres « frequent flyers » et journalistes à  assister aux exercices de déneigement pour comprendre l’ampleur et la complexité du dispositif (pour ceux qui auraient aimé être à  notre place je vous informe que se promener en plein hiver à  3h du matin sur les pistes de Roissy est peut être intellectuellement enrichissant mais qu’on en ressort surtout frigorifié avec un gros rhume). Idem quelques temps après avec une visite de Roissy qui nous avait permis de voir les coulisses de cette impressionnante organisation….et de comprendre, entre autres, le circuit et le traitement des bagages. Autant de choses qui aident à  prendre du recul voire à  davantage anticiper et qui, en tout cas, rendent les clients mieux informés donc diminuent la tension et le stress d’une situation incomprise. C’est la même logique, pour rester dans le secteur, qui amène les compagnies aériennes à  organiser des stages pour les personnes ayant peur en avion, le dit stage comprenant un passage en simulateur pour comprendre comment les choses se passent dans le cockpit, comment se déroule un vol et ainsi « normaliser » la compréhension de la situation. Une visite au centre des opérations d’Air France vous donne également beaucoup d’humilité sur la gestion de crise une fois que vous vous retrouvez simple passager.

Bien sur ces opérations étaient exceptionnelles et destinées à  un public choisi qui contribue également à  diffuser le message autour de lui. Mais les technologies et les outils dont nous disposons aujourd’hui doivent permettre d’aller beaucoup plus loin pour permettre à  Madame Tout Le Monde d’enrichir sa compréhension d’une activité donnée, du fonctionnement d’une entreprise dans certaines situations etc. Vidéos, blogs, serious games, applications iphone…on peut faire de la pédagogie et jouer la viralité à  moindre frais en amont pour améliorer la qualité du dialogue lorsque la crise survient. Je parlais d’une initiative d’ADP mais des plateformes de discussion telles que SG et Vous, dernièrement lancé par la Société Générale, vont également dans cette direction. En permettant à  quiconque de poser des questions sur le pourquoi de certaines choses, sur le fonctionnement de la banque, on crée cette proximité, cette compréhension nécessaires à  un dialogue constructif. Après tout lorsqu’on se demande « pourquoi », on finit toujours par trouver la réponse sur un forum spécialisé ou sur Yahoo! Answers. Pourquoi les entreprises ne feraient elles pas preuve de plus de proactivité dans le domaine. Entre les dispositifs conversationnels et d’autres, plus éducatifs et informatifs, il y a matière à  faire avancer les choses.

Bien sur cela ne résoudra pas 100% des problèmes de communication, loin de là . Mais si cela peut contribuer à  générer de l’empathie, à  diminuer la tension dans les interactions en situation de crise et générer un tout petit peu de viralité et de bouche à  oreille (celui qui a compris peut à  son tour expliquer et rassurer ses contacts) ce sera quand même un grand pas en avant.

L’entreprise a surement beaucoup à  changer et à  apprendre. Mais pour aller plus loin on ne peut nier un besoin d’éduquer le client également.

Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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