Résumé : le challenge de l’entreprise n’est ni plus ni moins que d’arriver à trouver une manière efficace de travailler qui permet de conserver un équilibre global dans un environnement auquel elle doit s’adapter en permanence. Cela passe par l’adaptabilité des plus petits composants du système, les individus, mais également par la mise en place de mécanismes de régulation nouveau qui orienteront le comportement de tous ces individus vers une action collective commune et cohérente. Faire changer les individus sans changer les mécanismes de régulation peut, au contraire, amener à un résultat pire que la pourtant peu enviable situation initiale.
J’essayais dernièrement de prendre un peu de distance afin de définir de manière un peu précise ce qu’on entendait à travers le paradigme social/2.0. Notamment pour qu’une personne normalement éduquée mais sans affinité avec le web et autres technologies puisse comprendre la chose et ses grands principes sans avoir à trop rentrer dans les détails. Quelque chose qui s’apparente à une notion qu’on a tous appris et intégré (même si on ne s’en est plus servi depuis…le bac) et qui donne un idée globale du résultat escompté.
Finalement la première chose qui m’est venue de manière évidente à l’esprit est l’homéostasie. C’est la capacité que peut avoir un système quelconque (ouvert ou fermé) à conserver son équilibre de fonctionnement en dépit des contraintes qui lui sont extérieures. Au final c’est assez ressemblant puisqu’on parle de la capacité pour l’entreprise de continuer à fonctionner efficacement dans un contexte en évolution rapide, le tout avec une notion d’équilibre à la fois interne et externe à préserver. A l’occasion j’ai trouvé cette phrase de Walter Bradford Cannon : « « l’homéostasie est l’équilibre dynamique qui nous maintient en vie. » C’est exactement de cela qu’il s’agit pour l’entreprise : trouver un moyen de conserver un équilibre tout en étant dans un état de changement permanent.
Voilà , l’image est belle et très parlante. Elle permettra de briller dans les diners en ville mais vous me direz qu’au final ça n’est que de la poésie. Et vous aurez raison. Mais si on pousse la logique plus loin il y a d’autres choses à apprendre.
En effet, essayons de répondre à la question « comment ça marche ? », en gardant en ligne de mire que l’idée est d’en tirer des enseignements pour l’entreprise. Après tout on parle d’entreprise organique…donc autant aller au bout de l’idée.
A première vue cela fonctionne parce que les éléments du système s’adaptent. Vrai mais un peu rapide comme conclusion. Ils se s’adaptent pas d’eux mêmes mais en fonction d’un dispositif de régulation qui, d’une manière, les contraint. Un système adaptable et équilibré ne l’est donc pas uniquement parce ses élément s’adaptent mais parce que le systeme lui-même s’adapte et impose de nouveaux comportements à ses composantes.
Quelque chose que Deming avait mis en avant depuis des lustres : les facteurs systémiques sont responsables de plus de problèmes d’organisation, et par conséquent de plus de potentiel de développement, que les performances individuelles.
Première leçon au niveau de l’entreprise, il importe de changer le système davantage de d’exhorter au changement comportemental individual non coordonné, non cohérent et dépendant du bon vouloir de chacun. La capacité à changer de chacun, qui relève à la fois de la compétence et du comportement, n’a de valeur que dans un système qui permet et organise la mise en œuvre de ses compétences et comportements. Ou, vu sous un autre angle, ça n’est pas les collaborateurs qui, par de nouvelles attitudes, vont changer le système. Ils peuvent le violer, le briser en cas d’atteinte d’une masse critique mais la résultante ne sera pas un système adaptable (ou idéalement adaptatif) mais un chaos pire que le situation imparfaite initiale.
Par ailleurs l’entreprise n’est pas un système unique fait d’une multitude de composants pris tous ensembles (ses collaborateurs). L’entreprise est faite de divisions, départements, au sein desquels on trouve des équipes, lesquelles sont faites d’individus. L’enjeu de situe donc a minima à trois niveaux, chaque niveau devant s’adapter en fonction de ce qu’il contient et de ce qui le contient. C’est d’ailleurs peut être la grande différence par rapport à la vision biologique de la chose. En biologie le système s’adapte en fonction de son environnement, ce qui est en partie le cas de l’entreprise. Mais, pour cette dernière, on a également le phénomène inverse où l’équipe, puis le département puis l’entreprise doivent suivre un mouvement initié par un individu qui lui est impacté par l’extérieur (le client).
Il s’agit donc de travailler les comportements et compétences au niveau individuel, le management au niveau local, la manière dont on prend des décisions, apprend, communique, mesure etc. bref la régulation au niveau global. La réussite de ce qui est fait à un niveau dépendant de sa cohérence avec ce qui est fait au niveau supérieur et la capacité du niveau inférieur à l’exécuter.
L’homéostasie au niveau de groupes humains est elle un rêve ou quelque chose de réalisable ? Surement réalisable mais à condition de ne pas se méprendre et croire que faire porter le poids du dispositif aux plus petits éléments du système sera suffisant. Ce que l’on prend pour quelque chose de naturel est la conséquence de millions d’années d’évolution du « programme » génétique de nos organismes. Pour arriver au même niveau il faudra également reprogrammer le « système entreprise » et pas seulement demander à ses composantes de briser les règles. D’ailleurs lorsque des cellules brisent les règles indépendamment d’une évolution désirée du système, contre lui, cela à un nom : le cancer.
A méditer.