La transformation digitale n’est ni plus ni moins qu’une culture et une philosophie appliquée à la conception d’expériences nouvelles.
Le monde change tellement qu’on ne sait plus trop à quelle économie se vouer. Economie du savoir, économie de l’attention, économie digitale, économie de l’expérience… Les termes et concepts pour qualifier notre réalité d’aujourd’hui ne manquent pas et contrairement aux concepts et buzzwords orientés techno (les 2.0, 3.0, social et consorts) je ne pense pas qu’il s’agisse d’un artifice de communication destiné à sans cesse rhabiller la même chose avec des mots nouveaux. Ce sont différentes faces d’une même réalité qui se mêlent et se recouvrent, chacun voyant midi à sa porte en fonction de sa sensibilité propre.
Si le coté chaotique – bordélique diront certains – du web a ses défauts, il a aussi ses avantages. Il permet à chacun, par serendipité, de trouver des sujets connexes à sa matière de prédilection et, peu à peu, à comprendre comment les deux s’imbriquent et s’impactent. Il n’y a pas pire faiblesse dans le monde d’aujourd’hui que de continuer à penser « dans sa boite » et on l’a bien vu depuis une dizaine d’année chez ceux qui ont « fait leur boulot ». Des RH ont appris à parler logiciel, des IT ont commencé à regarder coté métier, et en, ce qui me concerne en suivant tous les leviers et « drivers » de la transformation interne et la « collaboration sociale » j’ai fini par m’intéresser à la relation client. Et à un moment donné il m’est apparu que la notion d’expérience était centrale dans les projets de transformation digitale.
Gardons bien en tête que pour véritablement mener le changement, si les causes profondes ne sont pas dans votre aire de prédilection, il faut essayer – à défaut de devenir un expert du sujet – d’être en mesure de parler à ceux qui travaillent à ce niveau. Sinon on fait de la maximisation locale et non de l’optimisation globale, façon élégante de dire qu’on agit en silo de manière désordonnée, administrant un remède qui s’avère souvent pire que le mal. Justement car on ne touche pas aux causes profondes.
Voilà pourquoi, même si j’ai déjà traité le sujet de manière plus légère auparavant, j’ai décidé de faire une série de billets sur la question de l’expérience dans le cadre de la transformation digitale.
Pourquoi ?
• Il est désormais acquis que c’est la dimension marketing et relation client qui « tire » la transformation digitale. Or, comme le montre récemment une étude Altimeter dont je le parlais ici, l’enjeu marketing de la transformation numérique c’est l’expérience client. Comme le disait le patron de Mercedes aux Etats-Unis : l’expérience client est la marque !
• Parce qu’il n’y aura pas d’expérience client sans expérience collaborateur. Et pour reprendre une fois de plus ce qui disait le CEO de Mercedes : « l’expérience client suit l’expérience collaborateur« . Une notion à considérer au regard de ce que l’académie du service à developpé avec le concept de symétrie des attentions. La qualité de la relation entre une entreprise et ses clients est égale à la qualité de la relation entre elle et ses collaborateurs. En creusant un peu on se rend compte que les éléments constitutifs de la relation employeur/employé sont nombreux et pas uniquement de l’ordre du relationnel. Ils peuvent également être transactionnels, opérationnels… On y reviendra.
• Parce que l’expérience est le point de convergence d’un grand nombre de sujets et qu’elle permet de donner une unité à la démarche, de la cohérence. Expérience client et expérience collaborateur, on l’a vu, mais pas seulement. Pour tous ceux qui ont compris que les données étaient le carburant du futur et peinent à savoir par où prendre le Big Data d’un point de vue opérationnel et concret, pensez à l’importance de la donnée dans la compréhension du contexte. Comprendre ce que le collaborateur ou le client ont besoin/envie de faire à un moment donné pour adapter leur environnement digital (voire physique) en fonction. Poste de travail, site e-commerce mais également comportement du vendeur ou du manager.
• Parce qu’à l’heure ou la cohabitation (voire la compétition) entre le digital et le « physique » est un problème pour les entreprises employant les deux canaux, et une question de vie ou de mort pour celles qui ne sont que physiques, la notion d’expérience est le paradigme qui permet d’aligner les deux et développer des synergies utiles pour sortir d’une logique d’opposition stérile.
• Parce que les entreprises qui gagnent, aujourd’hui et demain, ne sont plus celles qui excellent dans le « soft » ou le « hard » mais celles qui pensent les deux conjointement. Qu’il s’agisse d’une entreprise comme Apple, d’une chaine de magasins dans le retail, d’une banque… Soft et hard au sens large : matériel et logiciel, physique et digital, objets physiques et services.
• Parce que sous des airs qualitatifs, l’expérience a des impacts directement quantitatifs. Votre expérience c’est, on le verra plus tard, votre marge et votre productivité.
• Parce que nous sommes dans un monde ou finalement la technologie est peu différenciante. Les technologies digitales et sociales se banalisent, sont devenues des « commodities » et, par rapport à d’autres pans de l’univers IT restent très abordables. La technologie n’est pas la barrière à l’entrée. De la même manière, même du coté advanced analytics et Big Data, une grande partie du socle peut être open source (Hadoop…) même si, dans un second temps, on complétera utilement avec des solutions éditeur de chez IBM, SAS, SAP et autres leaders du secteur. Qu’est ce qui reste pour se différencier ? La manière dont cela est mis en œuvre et, justement, l’expérience qu’en tire le client ou le collaborateur. La capacité de mettre de la puissance technologique pure au service du client ou du collaborateur ne suffit plus, il faut également prendre en compte la manière dont ils vivent son impact.
Assez dit pour le moment, on explore tout cela dans les détails dans les semaines à venir.
En attendant, comme je le lisais ici :
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