On parle beaucoup de culture d’entreprise dans les projets de transformation (digitale ou non). Chez certain elle est le frein qui explique que tout bloque et chez d’autres (dont on ne parle pas assez) elle est le levier qui fait que les choses arrivent.
La culture d’entreprise : un bouc-émissaire facile
Inutile de revenir une énième fois sur l’importance de la culture d’entreprise dans de tels projets donc. Je me permettrai quand même de remarquer que souvent, si le sujet existe, il est inconsciemment ou volontairement sur-évalué pour trouver une raison de ne pas faire ou d’expliquer un échec. « Ca ne marchera pas » ou « notre culture ne l’a pas permis » sont des excuses le plus souvent en partie valables mais qui permettent également d’occulter d’autres sujets dont on ne veut pas parler. Comme, entre autres, le refus de toucher aux process existants (nouvelles technologies et comportements sur process ancien ne mène souvent qu’à l’échec), le refus de transformer son organisation, de toucher aux objectifs et critères d’octroi du variable et des primes ou de changer le portrait robot de l’employé type que l’on recrute.
Et puis il y a toutes les occasions qu’on a de laisser se produire un changement progressif et contre lesquelles on se protège.
L’entreprise a une culture qui se traduit dans les comportements, le management et la manière de faire. C’est à la fois une bonne et une mauvaise chose. Une bonne chose car elle permet de perpétuer une identité et des valeurs qui permettent la cohérence dans le temps (même si on confond aisément valeurs et culture d’ailleurs..). Une bonne chose car ça empêche le changement de se produire.
Un discours schizophrène sur le changement
L’entreprise recrute des collaborateurs nouveaux qui, ne serait-ce que pour des raisons générationnelles, sont plus proches de la vision cible que l’on a des comportements dans un monde digital que de la culture actuelle. Elle recrute également de nouveaux managers ou promeut des gens en interne qui incarnent aussi de nouvelles approches. Pas un saut quantique mais un léger changement par rapport à l’existant qui, dans le temps, peut amener à des transformations significatives sans trop d’effort. 1° d’écart au départ se chiffre souvent en kilomètres au point d’arrivée. Et le tout sans douleur : il suffit de « laisser glisser ».
Et quelle est la première chose que l’entreprise fait par rapport à ces managers et collaborateurs nouveaux qui incarnent en partie la destination qu’elle s’est fixée ? Leur rappeler tous les principes opérationnels et managériaux hérités du passé qu’ils doivent mettre en œuvre et faire perdurer alors que si on les laissait un peu plus être eux-mêmes on pourrait un peu glisser vers la vision cible.
Le pire étant que tout en leur demandant de veiller à l’héritage on leur demande en parallèle de conduire le changement et de faire bouger une culture qu’on leur demande de renforcer par ailleurs. Ubuesque. « Nous sommes ce que nous sommes car nous avons toujours fait comme ça, ce se sont nos repères », et, à côté « il faut vraiment insuffler de nouveaux comportements pour accompagner notre transformation digitale ». Que quoi rendre le manager fou et envoyer un message on ne peut plus trouble aux collaborateurs.
Il ne faut pas confondre culture et valeurs d’entreprise
Je reviens donc à la différence qui peut exister entre culture et valeurs. Même si ça n’est pas la panacée ni la solution unique à tous les problèmes, il y moyen de faire glisser la culture par le simple renouvellement des Hommes tout en restant fidèle aux valeurs mais en les interprétant différemment. C’est toute la différence entre copier un résultat et la recette qui a permis d’y parvenir. Copier la recette permet de garder les fondamentaux mais d’arriver à un résultat différent car le contexte a changé. Copier le résultat ne fait que pérenniser un status quo qui n’a peut être plus de pertinence.
En surprotégeant une culture qui ne demande qu’à glisser toute seule on se protège pas les valeurs d’une entreprise mais l’interprétation qui en a été faite à un moment donné mais qui n’est peut être plus pertinente aujourd’hui.
Peut être parce que ce mode de changement axé sur le lâcher-prise fait perdre l’illusion qu’on aime se donner de contrôler le changement ?
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