L’agile est à la mode. Pour délivrer leurs programmes digitaux les entreprises ont fini, parfois non sans rechigner, par passer au développement agile.
Les avantages sont indéniables. Pour ne citer que les plus évidents le fait de s’assurer qu’on colle aux évolutions du besoin, de ne pas découvrir au bout d’un an que ce qui est livré ne correspond pas au cahier des charges, de montrer au client interne ou externe qu’on avance au lieu de laisser un long effet tunnel laisser penser qu’on ne fait rien.
Et puis de manière indirecte un effet intéressant sur la conduite du changement. Plutôt qu’un grand big bang on introduit des fonctionnalités nouvelles au fur et à mesure et l’effort d’adaptation de l’utilisateur est moins important. De petites marches plutôt qu’un grand saut dans le vide.
Même si on sait bien que le digital n’est pas qu’une question d’outils, voire n’est surtout pas une question d’outils, la manière de les produire a quand même son importance.
Maintenant la manière dont l’agilité est mise en place en entreprise laisse encore à désirer. Déjà parce que tout le monde n’est pas aussi mur qu’on veut bien le dire sur le sujet et que beaucoup d’entreprises ne pratiquent qu’une version « light » de l’agilité encore mal maitrisée et n’ont pas encore été au bout de la démarche. Ensuite parce seules les équipes de production sont concernées.
On a donc un client qui itère avec une équipe au rythme de la semaine. Une équipe qui s’organise et échange lors de points quotidiens. Mais qu’en est il lorsque pour une raison ou une autre il convient d’escalader un problème, de prendre une décision, faire un arbitrage ou résoudre un problème à plus haut niveau ?
Et bien là on change radicalement de rythme. On attend la prochaine réunion pour en parler aux personnes concernées car on a pas le temps de les croiser avant en raison d’agendas déjà très chargés. Donc on attend 15 jours ou un mois avant de faire état du problème. Faire état seulement, parfois d’autres réunions seront nécessaires pour le résoudre. Pire, parfois il faudra encore remonter d’un niveau, avec des gens encore moins disponibles qui se rencontrent encore moins souvent. Et qui décident donc encore moins vite.
Et ensuite il faut encore que l’information redescende.
Et pendant ce temps ? Ceux qui doivent produire sont à l’arrêt ou avancent dans la mauvaise direction en attendant.
J’avais abordé de manière indirecte dans un billet sur le télétravail la question du management agile et de sa généralisation à tous les métiers de l’entreprise. Pourquoi le principe ne serait il pas, en effet généré à tous les métiers, fonctions support et management ?
Déjà parce que peu importe le métier il y a des projet à sortir, peu importe que le rendu soit digital ou pas, totalement ou en partie. Et l’impératif de tenir les délais, les coûts et de vérifier qu’on reste alignés sur le besoin existe, qu’on soit développeur, RH ou qu’on fasse du marketing.
Ensuite parce qu’à la vitesse à laquelle vont les choses aujourd’hui il est impossible qu’au sein d’une équipe les informations importantes et problèmes ne remontent pas au minimum chaque jour au manager, à titre d’information ou charge à lui de faire les choses en main pour les résoudre.
Enfin parce qu’il n’est pas tenable dans la durée d’avoir une entreprise qui avance à deux vitesses avec un temps du management qui n’est pas le temps de l’exécution. Il n’est pas non plus possible d’avoir deux modèles d’organisation et de management qui cohabitent sans que cela coince aux interfaces, notamment pour des questions de vitesse. Je ne parle même pas du simple enjeu d’exemplarité avec ceux qui délivrent qui voient que les autres ne s’appliquent pas les mêmes règles et contraintes qu’eux, voir leur font subir leur lenteur.
Pour toutes ces raisons et sans doutes de nombreuses autres en 2018 il est temps que l’agilité sorte de la cave et se généralise à toute l’entreprise.
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