Redémarrage de ce blog après une très longue coupure estivale qui a bien fini devenir définitive. Je vais commencer par un certain nombres de livres qui s’empilaient sur ma table de chevet faute de temps pour les lire. Le premier d’entre eux est « Big Data, Smart Data, Stupid Data » d’Antoine Denoix de chez Axa France.
J’ai toujours eu une relation d’amour-haine avec le sujet Big Data. Amour parce que le sujet est passionnant, qu’on est à peine en capacité de voir ce que cela changera à long terme, et qu’il s’agit davantage d’une sujet business, sociétal, éthique que technologique. Haine parce que le terme est tellement galvaudé et sert encore trop à des apprentis sorciers pour vendre n’importe quoi à des entreprises encore trop incrédules et pas assez préparées.
Bref j’étais curieux de découvrir cet ouvrage qu’on m’avait promis « garanti sans langue de bois », quatre ans déjà après le toujours d’actualité livre de Tom Davenport que j’avais beaucoup apprécié.
Qui ?
Antoine Denoix, Chief Marketing, Digital, Data & Customer Officer Axa France.
Quoi ?
Big Data, Smart Data, Stupid Data…comment (Vraiment) valoriser vos données.
L’idée principale.
Demain tout produira de la data, tout utilisera de la data. Pour une entreprise, passer à côté de cette opportunité signifie rater quelque chose en termes de compétitivité. Pour autant se jeter dans le Big Data a corps perdu n’est guère utile sans savoir pourquoi on le fait, comment le faire, et tout ce que cela implique au delà de la technologie.
Un peu plus en détail.
1°) La data, pourquoi la data ?
Nul n’arrive à destination qui ne sait où il veut aller. Ce principe vaut plus que jamais en matière de data : il n’est pas question de triturer des montagnes de données, voir ce qui en sort et à la fin faire du retro-engeenering pour en déduire une vision a posteriori. Ca ne marche pas. Il y a 3 niveaux d’objectifs qui correspondent à des situation et des maturités différentes : survivre, faire mieux, faire autrement.
2°) La data est un sujet culturel
La data change profondément la manière dont on va travailler, prendre des décisions, structurer les organisations. Elle pose des problèmes de transparence, d’ownership, d’éthique. Elle donne envie autant qu’elle fait peur. Elle génère donc tous les freins habituels que l’on rencontre en situation de changement et demande donc un minimum de culture partagée, surtout au sein de fonctions qui n’ont pas une culture technologique ou « chiffres » très développée.
3°) Trouver la bonne trajectoire
La question n’est pas d’avoir des moyens infinis (ou pas) et une profusion de technologie mais savoir par où commencer et par où passer pour prouver des premiers bénéfices, convaincre, sans provoquer une réaction d’auto-défense de l’organisation souvent meurtrière pour les idées trop disruptives.
Je mettrai surtout en avant une approche qui sort vraiment des sentiers battus et qui quoi qu’iconoclaste à première vue en terme de « bien pensance managériale » tombe sous le bon sens : démarrez sur des projets, des cas d’usage, où l’humain sera le moins sollicité possible.
Pourquoi ? On se débarrasse ainsi de tout biais au moment d’évaluer le projet, on voit le potentiel « brut » de la data, sans avoir à se demander si l’humain se l’est approprié ou non, a joué le jeu ou au contraire a joué contre son propre camp par peur du changement. Une fois qu’on a montré le potentiel intrinsèque de la data il est plus simple d’aller sur le terrain plus complexe des synergies homme-machine.
4°) Gérer le changement
Rien de neuf ici mais encore faut il le dire : comme dans tout projet de changement tout est dans la manière dont on positionne le curseur entre la nouveauté et l’existant, le changement et le status quo.
Antoine Denoix rappelle également une chose évidente mais que je vois trop souvent manquer dans les projets de transformation d’ampleur : la nécessité d’un mandat clair de la direction…et son support.
On voit trop de gens, sur des sujets majeurs, être en charge de la transformation…à condition de ne pas faire de vagues. Comprenez : à condition que leur direction n’ait pas à se mouiller pour eux. J’ai tout le respect du monde pour les passionnés, les convaincus, les évangélistes…mais la vérité c’est que ça ne marche pas, ou pas assez vite, ou que le changement porté par une personne s’évapore le jour où la personne en question n’est plus là pour tenir l’édifice. Convaincre c’est bien et c’est nécessaire mais si on laisse penser une seule seconde que le changement est une option on va dans le mur. On peut toujours discuter du comment, pas du but.
5°) Ne pas se prendre les pieds dans le tapis
L’auteur termine avec un petit concentré de bon sens que seuls peuvent élaborer ceux « qui ont fait ». Entre conseils avisés (légal…), lutte contre les fausses bonnes idées (perfectionner à l’extrême n’est pas toujours faire mieux) et rappel au bon sens (qu’espérer de la data…et quand faut il s’en méfier) il sort des discours des évangélistes béats pour bien ramener tout le monde les pieds sur terre.
Mon avis.
Franchement, le livre se lit vite et bien, voire se dévore. A la fin on a vraiment envie de se lancer et on est même convaincu d’avoir la boite à outil pour. Donc bravo pour faire preuve de pédagogie sur un sujet qui, lorsqu’on creuse, n’est pas toujours à la portée de tous. Un exercice de vulgarisation heureux et mené à bien.
L’ensemble du livre sent bien le retour d’expérience du praticien. Pas pédant, « no bullshit », accessible à tous. C’est quelqu’un qui mené un projet d’ampleur et qui vous partage son expérience et les leçons qu’il en a tiré de manière conviviale, presque comme si on échangeait avec l’auteur à la pose café.
Dernier bon point : les exemples abondent, les illustrations aussi et tout le jargon du sujet est expliqué, simplifié, mis a la portée de tous.
Bref un « le big data par l’exemple, mis à la portée de tous ». Ca manquait et c’est à acheter impérativement si vous devez travailler sur le sujet mais que vous vous sentez un peu léger sur les fondamentaux et les bonnes pratiques.
Photo : Big Data De Elnur via Shutterstock