Les jeunes et l’entreprise : pas si disruptifs que cela

Il y a quelques semaines Jam Trends a publié une étude sur le rapport entre les jeunes et l’entreprise, intitulée « Qu’est ce que l’entreprise a (encore) à offrir aux jeunes« . On lit un peu partout qu’ils sont désabusés, ne croient plus en l’entreprise, voire ont même cultivé une certaine défiance à son égard qu’il est intéressant de lire ce qu’ils en disent eux mêmes car comme je le dis souvent on parle beaucoup d’eux à leur place, on parle beaucoup à leur place, on les instrumentalise mais finalement on ne les écoute guère.

Des chiffres qui peuvent inquiéter

Une étude Job Teaser de 2019 nous disait en effet que 62% d’entre eux ne voulaient pas travailler pour une grande entreprise, que 52% ne se voyaient pas rester dans la même entreprise toute leur vie ou encore que 35% seulement rêvaient d’un CDI.

Des chiffres inquiétants de prime abord ? Je ne pense pas. Il est certain qu’en les regardant avec un regard de « vieux » et en comparant à ce qu’on attendait, nous, à leur âge on pourrait le penser. Mais les temps ont changé.

A l’époque la grande entreprise était quasiment le seul choix, les startups peu développées. Le fait qu’on ne fera pas carrière dans la même entreprise est, je pense, acquis depuis au moins 20 ans et pour ce qui est du CDI c’est simplement un regard pragmatique qu’ils portent sur le monde de l’emploi.Ce qui me fait dire qu’ils sont plus pragmatiques que défiants.

Mais regardons maintenant, en comparaison, ce que nous dit l’étude Jam Trends qui concerne les jeunes français de 15 à 25 ans.

Les startups n’ont pas la cote

Seuls 20% se voient travailler pour une grande entreprise mais plus surprenant 8% pour une startup. Comme quoi les possibilités de carrière offertes l’emportent sur l’innovation. Même le fait de travailler pour soi-même est plus séduisant que travailler pour une startup (13%). Les grands gagnants sont le secteur public et les PME/TPE avec 22% chacun.

Bien sur le paysage a bien changé depuis le début des années 2000 mais on ne peut pas vraiment parler de révolution.

Des attentes pas vraiment disruptives

Quant à l’offre d’emploi idéale elle doit porter sur un job passionnant (ou en lien avec leur passion), le salaire doit être affiché (bonne chance….) et correct, les collègues et l’environnement de travail doivent être sympas, elle doit afficher des valeurs que les candidats partagent et la vie privée doit être préservée.

Là encore rien de vraiment surprenant, peu importe la génération je n’ai jamais vu personne rechercher un job sans intérêt, mal payé et avec des collègues désagréables. Peut être que la dimension valeurs, elle, a quand même progressé, on y faisait moins attention avant au profit du prestige de l’entreprise et des carrière offertes.

Une demande d’intégration

Les jeunes veulent vraiment sentir qu’il font partie de quelque chose, qu’ils ne sont pas qu’un salarié parmi d’autres.

Leurs demande : un environnement de travail bienveillant, de la convivialité et sentir qu’ils sont sur une trajectoire.

Des résultats qui tordent le cou à l’étiquette individualiste qu’on leur colle souvent. Ils semblent être dans le « nous » et peut être plus que certains qui les ont précédés.

L’envie d’apprendre

Une autre caractéristique qui est la leur est l’importance qu’ils attachent au fait d’apprendre. Logique mais pas neuf : cela fait plus de 20 ans qu’on a compris que ce qu’on appris pendant nos études ne nous aidera pas beaucoup plus loin que notre premier emploi et que si on n’apprend pas de nouvelles compétences voire de nouveaux métiers cela risque d’être problématique.

Ainsi ils accordent beaucoup d’importance aux soft skills (un domaine où je trouve que les entreprises sont bien timides en termes de formation), du mentoring, plus de ponts entre les entreprises et les école (là je trouve sévères pour les grandes entreprises mais réalistes pour les ETI/PME), ils veulent être responsabilisés et avoir la confiance de leur managers.

Responsabilité sociale : no bullshit

Bien entendu c’est un terrain sur lequel on attend spécifiquement cette génération. Pour 29% d’entre eux c’est aux entreprises d’agir en premier pour l’environnement qui sans surprise est la première de leur préoccupation.

Ils semblent plutôt demandeurs d’action concrètes même petites que de grand discours qui ne mènent à rien. Plus surprenant (l’avenir nous dira s’ils ont raison ou pas) ils ne croient plus en l’innovation pour améliorer les choses.

Les jeunes, des vieux comme les autres

Une étude très intéressante dont je vous recommande la lecture car elle pose un constat assez lucide et moins dramatique que ce qu’on peut lire ici et là et donne de bonnes pistes aux entreprises pour parler à cette population.

Maintenant on peut aussi se poser une question : je pense fortement que ces attentes ne sont pas tant le propre d’une génération que d’une époque. Posez les mêmes questions à des gens de 40 ou 50 ans je ne suis pas sur que les réponses soient très différentes.

Photo : Millenials de View Apart via Shutterstock

Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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