Qui s’occupe des collaborateurs dans l’entreprise ? Différents rôles, différentes approches

Quand on parle d’expérience employé se pose immédiatement la question du périmètre de la fonction qui elle entraine celle de complémentarité ou du chevauchemement avec d’autres fonctions. Commençons par le premier point.

Souvent j’entends « ah oui on fait déjà de l’expérience employé mais on l’appelle pas comme cela ». Ou alors « chez nous c’est chez les RH ».

Comme je le dis souvent peu importe le nom, ce qui compte, si c’est important, c’est que quelqu’un s’en occupe. Et qu’on soit d’accord sur le périmètre exact, cela va sans dire mais cela va mieux en le disant.

Donc petit tour d’horizon des différents nom qu’on peut donner aux équipes qui s’occupent des collaborateurs dans l’entreprise.

Les ressources humaines : un vieux métier qui peine à se réformer

Commençons par le plus naturel et le plus légitime a priori : les ressources humaines. Logiquement l’expérience employé devrait être chez les RH mais…

Mais si on considère que la fonction Expérience Employé est une fonction « transformative » elle n’y a pas sa place, ou pas dans la configuration actuelle en tout cas.

Le gros problèmes des ressources humaines aujourd’hui est qu’elle peine de s’affranchir du carcan juridico légal dans lequel on l’a enfermé alors qu’on l’appelait « gestion du personnel ». Le nom a changé, sa vision aussi mais on ne lui donne pas les moyens de devenir totalement ce qu’elle aimerait devenir. La sécurité juridique et la paye d’abord, le reste ensuite. Et je ne parle pas des problèmes de sous staffing.

Ca n’est pas pour rien qu’on voit, mais pas encore trop en France, la partie people/talents et la partie administrative se séparer, seul moyen d’éviter le déclassement de la fonction. On pourrait très bien mettre l’expérience employé dans ce pole People, ou dire que c’est la même chose ou mettre, comme dans mon cas actuel le People dans l’expérience employé. A une chose près : comme je disais en présentant ma vision de la fonction : l’expérience employé à vocation a avoir un impact direct ou indirect sur les opérations, les process internes et métier et la manière dont l’entreprise fonctionne. Le vrai sens du fameux HR Business Partner qui n’est souvent que partner a mi-temps et pas trop business car il n’a aucun pouvoir sur le contexte de travail du collaborateur à son poste. Et je ne suis pas certain du tout que la fonction People veuille aller vers cela et se salir les mains dans l’opérationnel métier.

Bref une complémentarité naturelle mais des périmètres à définir et articuler.

Le Well Being : indispensable mais trop limité

Très souvent entendu aussi. « L’expérience employé ? Ah oui nous aussi on s’occupe du bien être au travail ». Encore une fois une question de périmètre.

Le bien être au travail ? Je crois totalement en sa valeur et j’en avais parlé il y a quelques années. Maintenant il ne faut pas que selon mon expression favorite cela se résume à « mettre un sauna à côté de la salle de torture« . Pour moi l’expérience employé englobe volontiers le bien être au travail mais y ajoute le bien être « dans le travail », autrement dit quand la personne est en situation de travail, de production.

On peut faire ce qu’on veut pour le confort, la santé, la détente, l’équilibre travail/vie personnelle mais, même si cela concoure à l’efficacité dans le travail cela ne compense pas a long terme un travail pénible, mal organisé et une organisation qui ralentit le collaborateur.

Parce qu’à la fin, quand on lui demandera son avis ou quand il partir il aura oublié les initiatives well being et ne parlera que d’une organisation lourde et compliquée et d’un manager qui ne l’aidait pas.

Le bonheur au travail : une promesse dangereuse et inappropriée

Le concept qui fait des ravages en ce moment mais qui me laisse plus que sceptique. Entendons nous bien, je n’ai rien contre le fait que les gens soient heureux au travail, bien au contraire. Le jour où vous trouverez un manager ou dirigeant qui vous dira que finalement des gens malheureux c’est quand même sympathique fuyez en courant ou conseillez lui d’aller travailler aux pompes funèbres.

Pour autant quelle entreprise, quel dirigeant, quel manager peut avoir le courage de promettre le bonheur en regardant ses salariés dans les yeux ? Personne n’a la même définition du bonheur. Elle change selon les personnes et selon les époques. Alors au niveau d’un collectif de 10, 100, 1000, 100 000 individus, tenir la promesse relève de la mission impossible.

Et puis de quels leviers dispose l’entreprise pour rendre les gens heureux ? Le bonheur au travail n’est qu’une illusion. On est heureux ou pas, mais on n’est pas heureux au travail et malheureux en dehors ou l’inverse. A partir du moment où (et c’est heureux) l’entreprise n’a aucune prise sur la vie privée du collaborateur, faire la promesse du bonheur c’est prendre un engagement ambitieux et avoir la certitude de décevoir.

Au lieu de promettre de rendre les gens heureux, que l’entreprise se contente d’éviter les rendre malheureux et ce sera déjà bien.

Et qu’on remplace bonheur par satisfaction et on sera davantage dans une promesse réaliste. On peut être satisfait sans être heureux mais au moins l’entreprise fait une promesse qui ne tient qu’à elle de tenir.

Donc j’espère qu’une bonne expérience employé apportera de la satisfaction et, si la vie personnelle du collaborateur va bien, qu’elle contribuera à son bonheur. En attendant ça ne peut être un objectif réaliste en soi donc je ne vois aucune utilité à la fonction de « chief happiness officer ».

Et si le sujet vous stimule quand même je vous laisse vous demander si le bonheur rend performant ou si la performance rend heureux.

Bref, hors sujet.

People Operations : une tendance prometteuse

J’ai récemment vu arriver des départements « People Operations ». Si je reprend la définition qu’en donne Workable :

« People Operations est une fonction des entreprises qui place les employés au premier plan. Bien qu’elle relève du domaine des ressources humaines, elle a une portée plus large : elle comprend toutes les actions qui aident les employés à être productifs au travail, du moment où ils sont embauchés au moment où ils quittent l’entreprise.

Examinons plus en détail les principales responsabilités des opérations humaines. Elles sont :

  • Moderniser et numériser les systèmes RH bureaucratiques et obsolètes, y compris les logiciels de paie et de suivi des candidats.
  • Traiter les employés comme des clients internes et accroître leur satisfaction.
  • Soutenir les employés au quotidien et répondre aux questions sur les avantages sociaux et les politiques de l’entreprise.
  • Suivre et analyser les indicateurs RH (par exemple, les taux de rotation du personnel, le temps d’embauche).
  • Intégrer les nouveaux employés et veiller à ce qu’ils aient accès aux ressources et aux technologies nécessaires. »

Alors là on est dans quelque qui n’est ni opposé à ma conception de l’expérience employé, ni bullshit, ni même complémentaire parce que cela tombe en plein dedans et c’est certainement donc ce qui s’en rapproche le plus.

J’achète totalement à un détail près. Quand on parle de « actions qui aident les employés à être productifs au travail » il manque indéniablement dans le périmètre un impact direct sur les opérations. Pas les opérations concernant les personnes, mais celles que réalisent les personnes et le contexte dans lequel elles les réalisent. Une fois encore la dimension impact sur le business au travers de l’organisation et de la simplification des systèmes, outils et process qui me tient tant à cœur.

Au final selon les entreprises on voit pleins de manières de s’occuper des collaborateurs, différentes manières de faire, différents départements responsables.

Quelle est la meilleure option ? Aucune. Tout dépend des objectifs qu’on se donne, de jusqu’où on aura le courage d’aller. Ensuite appelons ça comme on veut tant que le mandat et le périmètre sont clairs et que le ou les départements en charge ont les moyens de leur objectifs et ne se tirent pas dans les pattes.

Ceci dit j’avoue ne pas être confortable avec le terme expérience qu’on galvaude tellement à force de slogans marketing fumeux qu’il faudra bien s’en débarrasser un jour pour rendre le sujet plus crédible pour un public plus large. Ce jour là je pencherai bien pour People Operations ou People Ops qui me plait beaucoup.

Photo : s’occuper des collaborateurs par Blue Planet Studio via Shutterstock

Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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