Il semblerait qu’il y ait une réelle désaffection des salariés envers les outils informatiques de leur entreprise. Parallèlement les entreprises qui ne cessent d’investir en la matière s’étonnent de la faible adoption des outils par les collaborateurs et leur faible niveau de satisfaction.
En me penchant sur le sujet j’ai trouvé un très intéressant rapport de PWC nommé « Our Statuts Of Tech At Work : It’s complicated » (Notre état des lieux de la technologie au travail : C’est compliqué !).
Que nous dit il?
Les utilisateurs ne se sentent pas pris en compte
La première chose qui frappe est qu’alors que les entreprises disent faire leurs choix technologiques en fonction de leurs utilisateurs, le sentiment de ceux-ci est que ça n’est pas du tout le cas.
Que doit on en penser ?
Mon expérience est que l’utilisateur final est souvent pris en compte pour choisir une solution souvent nouvelle dans le cadre d’un pilote ou d’un déploiement à petite échelle. Lorsqu’on passe un déploiement global c’est quelque chose que j’ai rarement vu.
Les premiers critères sont, une fois que le scope fonctionnel est validé, le fait que le produit traine souvent sur une étagère ou soit proposé par un éditeur qui a une présence majeure dans l’entreprise et enfin le prix (ce qui revient souvent au même).
Ensuite j’ai déjà entendu « c’est joli ils vont aimer » dans la bouche d’un décideur à peine capable de se servir de ses propres outils. Si c’est le seul critère…
Autre chose : comment prendre l’utilisateur en compte lorsque la plupart du temps on ne sait pas ce qu’il fait au quotidien concrètement.
Il y a bien des groupes d’utilisateurs test mais souvent ils n’ont qu’un contact bref avec l’outil, pas dans un vrai contexte de travail et ne peuvent voir tous les petits détails qui posent problème dans une utilisation plus intensive.
Il y a également un biais dans le choix d’une technologie : les décideurs considèrent un outil en tant que tel alors que le collaborateur ne pense pas outil mais parcours ou flux de travail. Comment s’intègre-t-il avec les autres outils qu’il utilise, va-t-il devoir ressaisir des données plusieurs fois etc. ?
Un outil peut être le meilleur à tout point de vue mais devenir un point de friction dans le flux de travail du collaborateur.
Enfin parfois on change les outils sans changer les modes de travail ni les process ce qui empêche non seulement de tirer le maximum de son potentiel mais crée même une régression par rapport à l’ancien outil pourtant moins moderne.
C’est quelque chose de notable avec les outils collaboratifs : ils permettent des modes de travail nouveaux mais si on les utilise à l’ancienne ils posent un problème d’adoption sans apporter de bénéfices. Le meilleur exemple en la matière est peut être Teams qui a un potentiel remarquable mais qui ne se manifeste que si on change vraiment sa manière de travailler. Or pour beaucoup d’utilisateurs ça n’est qu’une solution de visioconférence et pour qu’ils perçoivent son potentiel il faut non seulement qu’il en fassent l’effort mais également que tout le monde le fasse autour d’eux. Si un essaie d’en tirer le plein potentiel mais pas ses collègues il sera en décalage, celui lui posera des problèmes au quotidien et il fera machine arrière.
Peu de temps pour acquérir des compétences digitales
Un reproche que j’entends souvent est que les salariés ne font pas l’effort. Je ne suis pas d’accord et le rapport le montre : ils ont envie de prendre du temps pour améliorer leurs compétences digitales.
Ils sont même prêts à y accorder en moyenne 15h par mois ! Mais seulement 50% sont satisfaits des ressources à leur disposition pour le faire et, de plus, ils n’ont pas le temps de le faire sur leur temps de travail.
Le Forum économique mondial estime que d’ici 2022 (le rapport date de 2018), plus de la moitié (54 %) des employés auront besoin d’une formation importante, dont plus d’un tiers (35 %) nécessitera au moins six mois d’efforts. Est-ce que cela a finalement eu lieu ? J’en doute.
Cela n’arrivera pas ni par hasard ni sur leur temps libre.
Les salariés aiment encore le contact humain
Les salariés comptent sur la technologie pour leur simplifier la vie mais pas pour tout. Les entreprises ont peut être été trop loin dans le self-service.
Ils valorisent le digital principalement pour les tâches administratives.
Ce qui me rappelle une autre étude sur les attentes vis-à-vis des robots.
29% des salariés ne veulent pas qu’on change leurs outils
Dernier point intéressant : qu’est ce qui motive les salariés à adopter de nouveaux outils ?
Pour 34% d’entre eux c’est la curiosité et la volonté d’être plus efficaces et collaboratif, pour 37% c’est une manière de changer de status et faire avancer leur carrière.
Mais il ne faut pas perdre de vue que pour 29% ce qui compte c’est de faire leur travail dans un environnement qu’ils connaissent et donc tout changement de technologie sera vu comme une source de désordre et un problème. Ca n’est pas qu’ils sont totalement fermés mais ni l’efficacité ni leur statut ne leur importe : ils veulent juste faire leur job sans être perturbé et trouver il faudra trouver pour chacun son levier de motivation, s’il existe.
Conclusion
Comme souvent les gens ne sont pas contre le changement mais la manière dont on veut les faire changer.
Ils ne refusent pas la technologie au travail mais trouvent qu’on ne leur donne pas ce dont ils ont besoin, ne sont pas assez formés et que les cas d’usages couverts ne sont pas les bons.
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