Le CRM peut sauver votre entreprise mais pas le CRM auquel vous pensez

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Quand une entreprise ou une équipe échoue, notamment en situation d’urgence on retrouve toujours les mêmes causes premières : leadership rigide, conflits internes, communication inefficace, défaut de partage d’information pour ne citer que les plus fréquentes.

Et même hors crise ou urgence les mêmes causes finissent par causer les mêmes effets. C’est juste un peu plus doux et ça prend plus de temps.

Bien sur les entreprises cherchent la martingale, parfois voire souvent au travers de la technologie mais on ne règle pas avec de la technologie des problèmes qui sont avant tout humains (On ne doit pas s’attendre à  ce qu’une application fonctionne dans un environnement dans lequel ses hypothèses ne sont pas valides).

Par contre certaines l’ont trouvé et forment leurs collaborateurs et même avant tout leurs cadres dirigeants et c’est un excellent exemple d’une pratique qui me tient à coeur : aller prendre dans une industrie une solution que l’on va ensuite appliquer à d’autres. Parfois vous trouvez la martingale, parfois juste des idées mais cela vous oblige à reconsidérer vos problèmes avec un oeil nouveau.

Cette solution a un nom : CRM.

Vous allez me dire que toutes les entreprises sont équipées et formées pour faire de la gestion de la relation client (Customer Relationship Management) et que non seulement cela n’a rien de neuf mais que ça règle en rien les problèmes en question. En effet.

Mais c’est juste une erreur d’acronyme : je veux parler ici du Crew Resource Management. En français bien que le terme CRM prévale chez adeptes et les connaisseurs vous entendrez parfois parler de gestion des ressources humaines en équipe, de gestion coordonnée des ressources ou encore de gestion intégrée des ressources.

Et comme l’organisation du travail et l’aérien pour l’un ma passion professionnelle et l’autre ma passion non professionnelle, je me fais un plaisir de creuser ici le sujet.

Les origines du Crew Resource Management

Le Crew Resource management nous vient de l’aviation.

Il est né dans les années 1970, après plusieurs accidents aériens qui n’étaient pas dus à des défaillances techniques, mais à des erreurs humaines, souvent liées à des problèmes de communication, de prise de décision, ou de gestion des conflits au sein des équipages.

Pour beaucoup l' »acte fondateur » est le vol United Airlines 173 (1978)où, pour faire simple, un pilote s’est concentré sur une anomalie au niveau train d’atterrissage sans entendre les alertes de son copilote sur le fait qu’ils allaient bientôt manquer de carburant. Au final l’avion a fini par s’écraser à 10 km de la piste alors qu’il aurait pu tenter un atterrissage.

Cela a eu deux conséquences.

La première est que l’enquêteur du NTSB (conseil national de la sécurité des transports américain) chargé de l’enquête a fait le lien avec plusieurs autres accidents aux causes similaires à savoir non pas un problème technique mais un problème d’organisation et de répartition du travail dans le cockpit.

La seconde est l’émission d’une recommandation de ce même NTSB pour que les compagnies aériennes veillent à ce que leurs équipages soient formés selon les principes de la gestion des ressources du poste de pilotage, en mettant particulièrement l’accent sur les mérites de la gestion participative pour les commandant de bord et sur la formation à l’assertivité (affirmation de soi) pour les autres membres de l’équipage.

La différence entre l’aérien et une entreprise normale est que lorsqu’on identifie un schéma qui mène à une issue finale cela se finit par l’imposition de règles nouvelles à l’ensemble du secteur pour que cela ne se reproduise jamais.

C’est ainsi que le CRM est devenu la norme afin que des problèmes qui sont principalement de l’ordre de l’humain, du cognitif et du collaboratif ne viennent causer un drame en l’absence de tout problème technique ou, dans une situation qui commence avec un problème technique éviter que la composante humaine ne vienne aggraver une situation au départ anodine.

Toute ressemblance avec des personnages et des situations réels en entreprise n’est que fortuite. Ou pas.

Les objectifs du Crew Resource Management

Partant ce qui vient d’être dit, les objectifs du CRM sont :

Améliorer la communication : s’assurer que chaque membre de l’équipe puisse s’exprimer clairement et qu’il y ait une écoute active, même dans des environnements stressants.

Optimiser la prise de décision : encourager des décisions collectives en utilisant les informations disponibles et les compétences de chaque membre de l’équipe.

Gérer les ressources : maximiser l’utilisation des ressources humaines, techniques, et informationnelles pour répondre aux besoins opérationnels.

Renforcer la vigilance et l’anticipation : aider les équipes à identifier et à résoudre les problèmes avant qu’ils ne deviennent critiques.

Réduire les erreurs humaines : comprendre les biais cognitifs et comportementaux pour minimiser leur impact.

Nul besoin d’être un génie pour comprendre à quel point nous rencontrons des problèmes similaires en entreprise.

Les fondamentaux du Crew Resource Management

Nous retrouvons ici des choses bien connues en termes de management et de leadership.

Leadership partagé : le commandant de bord est responsable, mais chaque membre doit pouvoir intervenir en cas de problème.

Assertivité et respect mutuel : encourager l’expression d’avis divergents de manière constructive et respectueuse.

Gestion des conflits : résoudre rapidement les tensions pour maintenir une dynamique de travail positive.

Conscience de la situation : comprendre l’état actuel des opérations et anticiper les prochaines étapes.

Révision constante : apprentissage continu à partir des erreurs et des retours d’expérience.

L’intérêt du CRM, à mon sens, par rapport à ce que j’ai pu voir en termes de formation au management, c’est qu’il impose des pratiques très codifiées là où en entreprise on joue plutôt sur le comportemental en espérant que les gens vont bien mettre en œuvre ce a quoi on les a sensibilisé.

J’y ajoute que son bon fonctionnement ne suppose pas que des gens soient obligés d’avoir longuement travaillé ensemble pour se connaitre et se comprendre : tout le monde suit le même modèle qu’on travaille avec des gens pour la première ou la millième fois.

Le CRM c’est un peu comme le « code de la route du cockpit » : il y a une manière de faire des choses, elle s’impose à tous et quiconque passe outre peut être pointé du doigt pour pas dire pire.

Voyons donc, maintenant, point par point, l’impact du CRM.

Crew resource management et communication inefficace

Il n’est pas rare que messages mal transmis, incomplets ou ambigus peuvent entraîner des erreurs coûteuses, des retards ou des conflits internes. J’en parlais d’ailleurs ici-même récemment (On ne devrait pas être promu manager si on ne sait pas utiliser ChatGPT).

Par exemple on donne des consigne vagues en pensant que l’autre a compris, on ne vérifie pas ce que l’autre a compris et au final on obtient quelque chose qui ne correspond pas à la demande et il faut recommander.

S’il s’agit d’une présentation powerpoint c’est dommage, si c’est un cadrage de projet ERP c’est dramatique et couteux.

Le CRM enseigne l’importance d’une communication claire et structurée, en utilisant des protocoles comme le feedback en boucle fermée (paraphraser et valider les instructions reçues). Le manager, par exemple, demander à chaque membre de répéter leur compréhension des demandes et priorités pour valider un compréhension mutuelle et alignement.

Crew Resource management et prise de décision en silo

Là encore on fait face à une situation connue. Des décisions prises par un individu ou un service sans consulter d’autres parties prenantes peuvent ignorer des données ou contraintes essentielles et mener à des erreurs majeures en entrainant des effets de bord.

Par exemple, un département décide d’investir dans un outil logiciel sans consulter les équipes techniques. L’outil s’avère incompatible avec les systèmes existants entrainant des parfois des couts d’intégration et des délais supplémentaires voire de devoir jeter le projet à la poubelle.

Le CRM promeut, lui, une approche de décision collective en intégrant les contributions de tous les membres compétents. Avant de choisir l’outil, une réunion interfonctionnelle pourrait avoir lieu pour évaluer les impacts techniques, opérationnels et financiers.

Crew Resource Management et gestion des conflits

Combien de fois des incompréhensions, inimitiés, conflits larvés entre collègues ont ruiné le fonctionnement d’une équipe ? Au quotidien c’est préjudiciable, s’il s’agit d’un projet majeur c’est gravissime, si c’est au niveau du comité de direction cela peut être fatal.

Par exemple dans une entreprise, l’équipe est divisée quant à la meilleure stratégie pour un client. Le conflit s’intensifie, et le client perçoit un manque de cohésion, prend peur et stoppe les négociations ou essaie de rompre un contrat existant.

Le CRM forme les équipes à gérer les conflits de manière constructive en utilisant des techniques comme l’assertivité et le respect mutuel. Ici, un manager pourrait intervenir pour établir un cadre de discussion et guider les parties vers une solution commune.

Crew Resource management et conscience de la situation

On est dans le cas où collaborateurs ne perçoivent pas ou ne comprennent pas les priorités, les risques ou les opportunités, ce qui entraîne des décisions inadaptées voire des conflits interne.

Dans l’aérien on est dans le cas malheureusement connu du vol Air France 447 entre Rio et Paris où l’équipage n’a pas su identifier une situation de décrochage.

En entreprise cela pourrait être une équipe logistique ne détecte pas une pénurie critique de stocks à temps, ce qui entraîne des ruptures d’approvisionnement pour les clients et les pertes financières qui vont avec. Ou simplement un chef de projet qui ne détecte pas très tôt dans l’excitation du lancement du projet une surconsommation de ressources dont on se rendra compte au fil du temps qu’elle sera fatale en termes de rentabilité.

Le CRM enseigne la notion de conscience de la situation : surveiller les signaux faibles, partager les informations pertinentes en temps réel et anticiper les évolutions. Un tableau de bord partagé et des réunions régulières pourraient être introduits pour surveiller les indicateurs critiques.

C’est une des premières choses que j’ai personnellement « volé » au CRM (Améliorer le travail d’une équipe : histoire d’une amélioration continue) pour alimenter une démarche d’amélioration continue (participative et collaborative bien sur).

Crew Resource Management, stress, surcharge de travail et surcharge cognitive

Stress élevé, surcharge de travail, surcharge informationnelle et cognitive peuvent altérer les performances, réduire la prise de recul et provoquer des erreurs sans même parler de la dimension QVT.

On ne peut pas dire que sois d’ailleurs avare en alertes sur le sujet (Infobésité Numérique : Quand les Outils de Collaboration Dégradent Productivité, QVT et Amplifient la Charge Mentale ou encore dans le futur du travail la charge mentale est la nouvelle charge de travail).

Par exemple lors d’une période critique fusion d’entreprises, les managers sont submergés par les tâches administratives. Ce faisant ils négligent non seulement le business quotidien qui commence à se dégrader lentement mais sûrement avec une performance opérationnelle et financière qui diminue, des clients insatisfaits mais également les aspects humains, entraînant une démobilisation des employés.

Le CRM met l’accent sur la gestion du stress et la priorisation des tâches en équipe. Dans ce cas, déléguer certaines responsabilités et organiser des points réguliers pour partager les charges de travail permet de mieux gérer la situation.

Crew Resource Management et leadership

Où l’on reparle des « petits chefs » et autre tyrans de l’open space. Un style de management autoritaire peut décourager les collaborateurs de signaler des problèmes, exprimer des idées innovantes et est simplement source de peur, de stress et in fine de désengagement.

Dans l’aérien vous avez certainement un exemple « récent » en tête avec le crash du vol Asiana 214 en 2013 lors de son atterrissage à San Francisco. Parmi les multiples causes (toute humaines) a été relevé un problème de leadership à l’origine culturelle. Dans les cultures asiatiques on ne remet pas en cause l’autorité ce qui a impliqué que le copilote qui aurait du prendre les choses en main en réalisant que l’avion allait rater la piste n’a pas osé déjuger son supérieur ni reprendre lui même les commandes.

« cette surabondance de compétences, et de niveaux hiérarchiques – un aspect très sensible dans la culture coréenne – , ont semble-t-il joué un rôle déterminant dans l’accident. L’un des pilotes, auditionné par les enquêteurs américains, avoue ainsi s’être rendu compte avant même le crash que la procédure d’atterrissage était réalisée à une vitesse trop faible. Mais ce pilote a estimé qu’il n’avait pas « l’autorité » pour arrêter l’atterrissage » (Derrière le crash de San Francisco, un grave problème de management).

Dans une usine, un opérateur identifie une anomalie potentiellement dangereuse mais n’ose pas en parler à cause de la culture d’autorité stricte. L’incident s’aggrave, entraînant une des défauts de qualité à la chaine avec l’enchainement de conséquences qu’on peut imaginer.

Le CRM valorise un leadership partagé, où chaque membre de l’équipe se sent responsabilisé et écouté. Un manager devrait instaurer un climat où signaler un problème est vu comme un acte constructif et valorisé.

Quels sont les bénéfices du Crew Resource Management en entreprise ?

Pour ceux qui ont sauté directement à ce paragraphe pour s’épargner une longue lecture on peut donc dire en synthèse que que CRM propose les bénéfices suivants.

Tout d’abord une Amélioration de la collaboration interdisciplinaire. Les équipes travaillent mieux ensemble grâce à des pratiques de communication et de feedback standardisées.

Ensuite vient la réduction des erreurs humaines. En formant les collaborateurs à mieux comprendre les processus et les responsabilités des autres.

Enfin une adaptabilité accrue. Les équipes deviennent plus résilientes face aux imprévus grâce à une meilleure anticipation et à une gestion proactive des ressources.

L’adoption du Crew Resource Management en enterprise : ça ne décolle pas

Si on voit le verre à moitié plein on peut se dire que le sujet intéresse beaucoup d’entreprises et que certaines sont passées à l’acte. Si on veut le voir à moitié vide on peut parler d’une tendance assez anecdotique.

On voit bien le Crew Resource Management gagner en popularité dans des secteurs comme la finance ou la santé voire les industries à risque comme l’énergie mais c’est loin de suffire pour en faire une tendance globale.

Pourquoi ?

D’abord parce beaucoup d’entreprises n’en ont jamais entendu parler. A force de ne recruter que des personnes qui ne connaissent qu’un et un seul secteur on évite d’importer des idées venues d’ailleurs et, d’ailleurs, on ne regarde que son secteur et pas les idées à emprunter ailleurs.

Ensuite parce que former des équipes à des concepts inspirés du CRM peut être perçu comme coûteux ou complexe à mettre en œuvre.

Viennent ensuite des raisons culturelles : Certaines entreprises ont une culture d’autorité hiérarchique forte, peu compatible avec les concepts de leadership partagé et de communication assertive du CRM.

Pour ma part je vois également un énorme fossé entre le CRM et les nombreuses formations au management dont les entreprises sont grandes consommatrices.

Comme je le disais plus haut beaucoup de managers sont formés en termes de soft skills à tous les sujets évoqués ici. Mais ensuite ? Il faut espérer qu’une fois replongés dans le contexte de leur entreprise ils les mettent en œuvre ce qui est finalement rare : personne n’aime être une exception dans son mode de fonctionnement, surtout quand sa hiérarchie continue à opérer autrement.

A l’inverse la formation au CRM est rendu obligatoire par l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale, l’agence de l’Union Européenne pour la Sécurité Aérienne ou la Federal Aviation Administration aux Etats-Unis.

Ces réglementations stipulent que tous les membres d’équipage (pilotes, personnel de cabine, contrôleurs aériens) doivent recevoir une formation initiale et périodique en CRM, axée sur la communication, la prise de décision, la gestion des erreurs, et le travail d’équipe.

Le non respect avéré du CRM et a fortiori en cas d’accident peut entrainer une suspension des membres d’équipage, un avertissement, une obligation à se former… voire un licenciement dans les cas les plus critiques.

J’en reviens à tout ce qui touche aux soft skills et autres postures managériales. Les entreprises sont conscientes de l’importance du sujet et de ce qu’elles peuvent en retirer mais freinent des quatre fers dès qu’il s’agit de codifier et imposer quoi que ce soit en la matière (Avez vous un delivery model pour le management ?).

Quand c’est critique les démarches d’adoption ont des limites et il faut oser être normatif.

Une entreprise qui se crashe ça ne fait pas l’ouverture du journal de 20h

Avant même de rentrer dans une logique de déploiement opérationnel et systématique il y a une phase de sensibilisation.

De nombreuses entreprises offrant des prestations de simulateur d’avion (et même pour les loisirs) ont également des offres à destination des entreprises pour sensibiliser à la collaboration et la prise de décision sous stress.

Vous apprenez à des gens les basiques du pilotage, vous les mettez dans un cockpit, simulez une une panne et les laissez faire en donnant si nécessaire des instructions à distance.

Rien de tel qu’un cockpit dans l’obscurité et des alarmes qui sonnent et clignotent partout pour voir comment les gens réagissent sous stress. Je peux vous dire qu’on oublie vite qu’on est dans un simulateur.

Très bon pour la sensibilisation mais aussi pour le teambuilding.

Pour avec discuté avec le patron d’un tel établissement il m’a confirmé les bienfaits de la démarche : une équipe dirigeante d’une grande entreprise a ainsi été systématiquement incapable de coopérer et de s’écouter car sous stress ils perdaient de vue l’objectif (poser l’avion) et la gestion des priorités, le plus souvent pour imposer leur idée. Et à ses dire c’est en fait assez systématique.

Mais un dirigeant d’entreprise à qui j’en parlais une fois me disait qu’il était totalement séduit par l’approche mais qu‘il n’arriverait pas à justifier une telle démarche en raison des freins évoqués ci-dessus et surtout pas à la rendre obligatoire.

Je me souviendrai toujours de sa phrase : « Quand un avion se crash c’est rapide, violent, il y a des morts et ça fait la une du journal télévisé, dans une entreprise qui se crashe on meurt lentement et en silence et personne ne perçoit la gravité de ce que nous faisons mal jusqu’à ce qu’il soit trop tard« .

Même problème mais perception collective différente de sa criticité.

Conclusion

Qu’on parle du pilotage d’une entreprise, d’une équipe, d’un projet, les causes d’échec sont toujours les mêmes et sont bien connues.

C’est principalement une affaire de soft skills et de gestion de la communication, de la collaboration et de la charge cognitive.

La question n’est pas de savoir si on sait comment y répondre car la solution existe et a fait ses preuves, mais de savoir si on a le courage non pas de la suggérer mais de l’imposer.

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Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Head of People and Operations @Emakina / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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