Le digital ce n’est pas que du marketing

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Que je lise des études, des offres emploi ou que j’écoute une conversation sur le sujet il y a quelque chose que je trouve horripilant : quand on parle de digital on bifurque immédiatement sur le marketing et la relation client, comme si on oubliait que les collaborateurs sont, eux aussi, des utilisateurs et que la performance digitale d’une organisation commence en interne.

Oui, le branding et l’expérience client sont essentiels mais la meilleure promesse externe ne tient pas si l’interne dysfonctionne. La digitalisation ne se limite pas à optimiser une landing page ou à traquer des taux de clic. C’est aussi ce qui fait ou défait l’efficacité des équipes, la qualité du service rendu, la résilience de l’entreprise.

A force quand on me dit « tu es dans le digital donc tu fais du marketing » cela finit par me donner des pulsions meurtrières.

En bref :

  • La transformation digitale est trop souvent réduite au marketing, oubliant les besoins internes.
  • Pourtant la majorité des investissements digitaux concernent les opérations internes, souvent ignorées.
  • La performance digitale passe aussi par des outils, processus et décisions internes efficaces.
  • Les améliorations internes ont un impact direct sur l’expérience client et la qualité des produits et services.
  • Limiter le digital au client-facing empêche de saisir sa vraie valeur organisationnelle.

Une vision du digital trop souvent réductrice

Par facilité ou par héritage culturel, on a trop souvent associé digital à marketing. Résultat : quand une entreprise recrute un « Head of Digital Performance », c’est généralement pour suivre des KPIs d’acquisition, piloter des campagnes, ou optimiser des parcours clients. Rien sur les outils internes, sur les processus opérationnels, sur les irritants du quotidien.

Et pourtant, les chiffres nous disent bien autre chose.

Selon IDC, les dépenses mondiales en transformation digitale atteindront 3 900 milliards de dollars d’ici 2027, avec une majorité des investissements orientés vers les opérations, la supply chain, la production et le back office (Les dépenses mondiales liées à la transformation numérique devraient progresser de plus de 16% par an) et qui échappent en général au scope de ce qu’on appelle la transformation digital car ceux qui la pilotent n’ont aucun intérêt pour ces sujets qui ne sont même pas dans leur scope.

Peter Drucker nous disait que « le but d’un business est de créer et conserver ses clients« . Si le marketing crée des clients c’est tout le reste qui fait qu’on le sert et le conserve.

Le digital, c’est aussi du back-office, des process, des gens

La transformation digitale ne se joue pas uniquement sur un site web ou dans un tunnel de conversion. Elle s’incarne également dans des outils collaboratifs, la prise de décisions du quotidien, tous les flux d’information qui pillent la production, bref dans la vie réelle des équipes.

La transformation digitale c’est donc également un directeur logistique qui digitalise la traçabilité de la supply chain pour réduire les ruptures de stock, un DAF qui met en place un outil de pilotage budgétaire partagé pour fiabiliser les prévisions, une équipe RH qui déploie un portail pour fluidifier la gestion de la mobilité interne, un responsable de la conformité qui automatise les circuits de validation documentaire.

Peut être que tout le monde s’en moque, que c’est moins clinquant mais c’est ce qui fait qu’une entreprise fonctionne.

Aucune de ces initiatives ne fera la une de la presse ou ne remportera un prix d’innovation et c’est bien dommage. Pourtant, elles améliorent l’expérience employé, réduisent les frictions, augmentent l’efficacité et la productivité.

Et elles ont, en plus, un impact sur le client.

La performance digitale ne peut pas s’arrêter au client final

L’expérience client, la qualité de vos produits et services, tout est la conséquence directe de ce qui se passe en interne. Un service client premium ne tient pas sans un back-office fluide. Un délai de livraison respecté repose sur une supply chain connectée. Une promesse de personnalisation suppose des données bien structurées. De bonnes décisions demandent de la donnée et de bons outils. Une force de travail de qualité et performante demande un pilotage RH approprié.

Je pourrais continuer ainsi encore longtemps tellement la liste est longue.

Mais trop souvent, les moyens sont mis sur ce qui se voit alors que les gisements de valeur sont en coulisses. Les collaborateurs travaillent sur des outils vieillissants, multiplient les ressaisies, naviguent entre 12 applis métiers et tout le monde trouve ça normal.

On ne peut pas parler de performance digitale si l’on ignore ces angles morts.

La performance digitale c’est aussi de l’efficacité interne

Plutôt que de concentrer toute l’énergie sur la vitrine il faudrait remettre de la transversalité dans les réflexions digitales car la performance digitale c’est aussi : identifier les irritants internes qui freinent le travail quotidien, rationaliser et faire converger les outils en place, automatiser les tâches sans valeur ajoutée, cartographier les flux et les process pour les simplifier…

Autant de leviers que trop d’entreprises soit n’osent pas activer par manque de culture opérationnelle, soit parce que la transformation digitale est encore pilotée comme une extension du marketing.

Conclusion

Le digital n’est pas un métier, ni un canal, ni une fonction support mais une infrastructure invisible, un levier de transformation, certains diront même un langage commun. Tant qu’on le résumera à un rôle client-facing, on passera à côté de sa vraie valeur.

Le jour où les offres de « Head of Digital » incluront aussi la réduction des irritants internes, la cohérence des outils et l’amélioration de l’expérience salarié on pourra peut-être commencer à vraiment parler de performance.

Bertrand DUPERRIN
Bertrand DUPERRINhttps://www.duperrin.com
Directeur People & Operations / Ex Directeur Consulting / Au croisement de l'humain, de la technologie et du business / Conférencier / Voyageur compulsif.
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